Procédure : le prix à payer

  • 22/09/2010
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Le service pharmacie de l’hôpital Sainte-Anne a cherché à savoir combien pouvait coûter la conduite de deux procédures : un appel d’offre et un marché négocié. Montant de la facture : plus de 35 000 euros. Pour en savoir plus sur la méthode utilisée, suivez le guide...

Les acheteurs ont trop souvent tendance à se focaliser sur le prix du bien ou du service qu’ils souhaitent acquérir, et laisser de côté le coût global d’acquisition. Lequel comprend les frais inhérents à la conduite de la procédure. Un des premiers à s’intéresser au sujet fut Thierry Beaugé, consultant et formateur bien connu du petit monde de l’achat public, qui s’était « amusé » à calculer le coût de gestion d’un MAPA dont le montant oscillait entre 10 000 et 90 000 euros. Montant de la « douloureuse » : 6662 € (1). La pharmacie du centre hospitalier de Sainte-Anne a repris l’idée à son compte.  « Cela fait des années que j’avais cela en tête », entame Pascal Paubel, patron du service. Mais encore fallait-il avoir le temps de sortir la tête du guidon… La présence d’une interne en stage a été l’occasion de passer à l’acte, même si tout le monde a mis la main à la pâte. C’est l’appel d’offres de médicaments (un peu moins de 2 millions d’euros), lancé en novembre 2009 et bouclé en avril 2010, qui a été choisi pour passer aux rayons X. Ainsi que le marché négocié regroupant les lots infructueux qui a suivi de février à juin 2010. Quelle a été la méthode retenue ? L’équipe a établi un relevé du temps passé, et ce pour chaque agent impliqué dans le process (pharmaciens, médecins, personnel non médical). « Avant que la procédure soit lancée, j’ai expliqué à tous les acteurs que chacun devait remplir, le soir, un tableur excel partagé, pour indiquer les heures consacrées à la procédure », détaille Pascal Paubel.

600 heures de travail pour l’appel d’offres

« On peut critiquer le fait qu’il s’agisse de déclaratif. Mais ce qui nous intéressait, c’était d’avoir une estimation, un ordre de grandeur. L’objectif était de déterminer le temps de travail ainsi que la répartition entre les différentes catégories professionnelles », poursuit-il.  Restait ensuite à multiplier le volume d’heures par le coût horaire de chaque profession, donnée fournie par la DRH.  Le résultat est édifiant. Environ 600 heures de boulot et 19 593 euros au compteur. Pour bien comprendre et relativiser, précisons d’emblée qu’à l’instar de nombreux marchés hospitaliers, le nombre de lots de l’AO était très important : 697 dans ce cas précis. Pour sa part, le marché négocié (185 lots) a nécessité 171 heures soit 7027 euros. L’établissement de santé a voulu en savoir plus sur le poids des différentes étapes de la procédure et la répartition des frais entre la rédaction du dossier de la consultation ; l’étude des offres ; l’enregistrement des offres de prix sur logiciel ; la notation toujours sur logiciel et le classement des candidats ; l’attribution des lots ; et la notification des attributions. Concernant l’AO, pas de surprise, les deux moments « cruciaux » ont été la rédaction des pièces (97 heures, 4349 euros, soit 22% de la facture) et la saisie sur le logiciel de l’établissement des notes et du classement des candidats notation technique (169 heures, 6599 euros, soit 34% du coût). Pour le marché négocié, les étapes les plus longues et les plus onéreuses ont été la phase de négociation (115 heures, 5087 euros, soit 72%) et l’attribution des lots (27 heures, 901 euros, soit 13%).

Un boulevard pour l’achat groupé ?

Au total, les deux procédures ont coûté, en frais de personnel, 26 260 €. « Le résultat est sous-estimé puisque nous n’avons pas comptabilisé le temps de travail de nos collègues de la direction des achats », concède Pascal Paubel. Le responsable du service pharmacie n’a pas non plus injecté d’autres dépenses comme les m2 de bureau, les fluides, l’utilisation des ordinateurs, du téléphone, etc. « Je n’ai pas la possibilité de récupérer ces données », explique-t-il. Mais Sainte-Anne a pris le soin d’intégrer à son étude les 4000 euros occasionnés par les avis de publicité et d’attribution insérés au BOAMP. Et, à titre d’information, le coût annuel de maintenance des deux progiciels employés (4631 euros). Bref, 8669 euros à ajouter au compteur. Soit au global  35 289 euros. Et maintenant ? Pascal Paubel espère que son exemple va inspirer d’autres acheteurs. « C’est une première étude, elle vaut ce qu’elle vaut. L’intérêt,  c’est de pouvoir se comparer avec d’autres établissements. » Le montant de l’investissement pourrait des idées et accélérer le passage à la mutualisation, type RESAH-IDF. « Adhérer à un groupement en se disant « on va économiser un demi-poste » est simpliste, répond le pharmacien, car il faut au préalable déterminer quels seront les coûts incompressibles pour l’établissement. Lors d’un achat mutualisé, chaque hôpital doit quand même définir son besoin et participer à l’étude des offres. »

(1) Lire  6 662 €, c’est le prix théorique d’un MAPA