Offres variables : la méthode de Toulon

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La ville de Toulon joue les éclaireurs. Elle a d’ores et déjà mis au point une méthode d’analyse des offres variables (à télécharger). Favorable à ce nouveau dispositif, Chantal Saichi, la directrice de la commande publique, estime que les PME peuvent tirer leur épingle du jeu à la condition de prendre quelques précautions et de réserver l'outil à certaines hypothèses. Présentation de la méthode et des principes de base pour que les acheteurs ne s’arrachent pas les cheveux et que les PME fassent jeu égal avec les grands groupes.

On ne chôme pas à Toulon. L’équipe de Chantal Saichi, la directrice de la commande publique de la ville, a déjà mis au point une méthode d’analyse des offres variables, qu’elle a présentée lors de la conférence sur la réforme des marchés publics, organisée par le Moniteur et achatpublic.info, le 14 avril dernier. Autant le dire d’emblée, la technique toulonnaise est tout à fait différente de celle proposée par la direction des affaires juridiques de Bercy, expliquée dans une récente fiche technique. Chantal Saichi se montre d’ailleurs assez circonspecte sur cette méthode, en raison de sa trop grande complexité : « la solution de Bercy est un vrai casse-tête chinois, même les entreprises n’y retrouveront pas leurs petits », estime l’acheteuse.

Toutes les offres, variables ou pas, doivent être traitées comme des offres de base

Pour cette dernière, le principal écueil de la solution proposée par la DAJ tient au fait que les offres variables sont analysées comme des variantes : « toutes les offres, variables ou pas, doivent être traitées comme des offres de base, considère la directrice. Elles n’ont pas à être traitées comme des variantes », avance-t-elle. C’est là le point de départ de la méthode d’analyse de Toulon. « On ne doit pas imposer aux entreprises de faire une réponse séparée et globale, estime-t-elle. En d’autres termes, ajoute-t-elle, nous ne demandons qu’un acte d’engagement unique. »

Pas d’offres croisées

chantal_saichi_retaillee.jpgLa méthode d’analyse de Toulon repose sur quatre principes de base : « d’abord, il faut limiter la présentation d’offres variables à certains lots d’une consultation : 2 lots sur 5 par exemple.»  Ensuite, « Il faut choisir des lots se rapportant à un domaine professionnel lié, insiste Chantal Saichi. Par exemple, dans le cadre d'un marché de travaux alloti, on pourrait imaginer autoriser la présentation d'offres variables au titre des lots peinture et faux plafonds (ou peinture et revêtements muraux), mais pas au titre des lots « peinture et électricité ». Cela permettrait en fait de globaliser des lots de même secteur professionnel ou de secteurs professionnels très proches, analyse-t-elle.

Il faut choisir des lots se rapportant à un domaine professionnel lié

Ainsi, au moment du dépôt de leurs offres, des PME concernées par ces secteurs professionnels pourraient elles aussi nous faire parvenir une offre globale et se positionner en concurrence des entreprises de grande taille ou des entreprises tous corps d'état, susceptibles de répondre à plusieurs lots de manière intéressante sur le plan économique », argue-t-elle. Troisième principe : « Il ne faut pas accepter la présentation d’offres croisées. C’est-à-dire pas  d’offres variables à la fois sur les lots 1 et 2 et sur les lots 2 et 3 pour ne pas favoriser les grands groupes ou les entreprises TCE au détriment des PME. » (La méthode de la DAJ le permet). Enfin, dernier principe : « l’acheteur doit obliger la réponse aux offres « individualisées » pour la remise d’offres variables » afin de permettre ensuite le travail de comparaison des offres des entreprises entre celles qui proposent des offres variables et celles qui ne font pas.

Au cœur de la méthode

Comment faire concrètement ? « Il faut attribuer une note à chacune des propositions faites par les candidats. Ainsi, un candidat A pourra faire une offre individuelle au titre du lot 1 (AI1) et une offre individuelle au titre du lot 2 (AI2) et une offre globale pour les deux (AG1/2), explique-t-elle (ndlr pour mieux comprendre la méthode, lire les deux tableaux en pages 6 et 7 du powerpoint de présentation de Toulon à télécharger). Dans le cadre de son offre globale, il va peut-être faire un effort sur le prix, le délai ou les moyens mobilisés au titre des 2 lots. Bref, AI1 pourra obtenir un total de 70 points, AI2 de 65 points. Ces deux offres obtiendront une note de 80 et 70 points en tant qu'offre globale.

N'accepter qu'un seul acte d'engagement

Il en sera de même pour tous les candidats. L'étape qui suit consistera à identifier le candidat ayant fait la meilleure offre globale (au titre des 2 lots) et de lui attribuer les deux lots, si et seulement si, au titre de chacun des deux lots, aucun autre candidat n'a fait une offre individuelle plus performante (et donc mieux notée), poursuit-elle. Si tel est le cas, il faudra donc comparer le total de la meilleure offre globale au total des deux meilleures offres individuelles. Comme le conseille le MINEFI dans la notice explicative du nouveau formulaire ATTRI1, il conviendra d'accepter une seul AE au titre des 2 lots, faisant apparaitre le montant identifié de chaque lot », poursuit Chantal Saichi.


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Donnant-donnant

La directrice envisage maintenant d'aller, dans un premier temps, présenter cette méthode à la fédération des bâtiments du Var et ensuite, si le Sénat n’annule pas cette disposition, de tester cette méthode. « J’apprécie cette nouveauté car elle permet à la collectivité de ne pas perdre d’argent et aux PME d’en gagner, si les lots sont pensés intelligemment, commente l’acheteuse toulonnaise. Pourquoi payer deux déplacements lorsqu’une même entreprise peut exécuter les peintures et  le faux plafond ? interroge-t-elle.

Elle permet à la collectivité de ne pas perdre d’argent et aux PME d’en gagner

D’autant que j’ai déjà eu le cas de petites entreprises qui préfèrent ne pas répondre à un marché si elles n’ont pas la garantie de remporter les deux lots auxquels elles répondent par exemple.  En bref, les acheteurs sont encouragés à faire preuve d'ingénierie contractuelle et les opérateurs économiques à bien penser leurs propositions. Cela pourrait être du donnant-donnant », conclut Chantal Saichi.