Délais de paiement : ça ne s'améliore pas vraiment

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L’Observatoire des délais de paiement a publié ses résultats pour l’année 2011. Ils ne sont pas encourageants. Le délai global de paiement (DGP) de l’Etat s’est légèrement rallongé, tout comme celui des grandes collectivités locales et des hôpitaux. En cause : les difficultés financières rencontrées par certains organismes et les effets du déploiement de Chorus.

Alors que la crise économique et l’endettement de la France occupent l’actualité depuis plusieurs mois, les résultats de l’observatoire des délais de paiement pour l’exercice 2011 viennent confirmer , chiffres à l’appui, la détérioration de la situation financière des PME et de leurs donneurs d’ordre. Tout du moins jusqu’au mois de novembre dernier puisque le rapport annuel de l’Observatoire ne tient pas compte des résultats des deux derniers mois de l’exercice 2011. Or, il y a traditionnellement une accélération des mises en paiement pendant ces deux derniers mois de l’année. C’est d’ailleurs pourquoi la mission PME du ministère de la Défense, présenté dans le rapport comme un ministère rencontrant particulièrement des difficultés dans ce domaine, s’étonne qu’il soit pointé du doigt.  De fait, selon la mission, le bilan 2011 pour l’année complète n’est pas encore disponible et aucune analyse approfondie n’a pu encore être réalisée. Bien que l’analyse de l’observatoire pour 2011 soit incomplète, il n’en demeure pas moins que le bilan n’est guère encourageant pour les 10 premiers mois. Ainsi, le délai global de paiement de l’Etat (30 jours autorisés) s’est rallongé, passant de 27 jours fin 2010 à 36 jours en novembre 2011. Du côté des collectivités territoriales et des établissements publics locaux (30 jours, sauf pour les hôpitaux qui ont le droit de payer à 50 jours), les résultats sont contrastés. Les centres hospitaliers et les collectivités de plus de 10 000 habitants font figure de mauvais élèves, tandis que les villes de moins de 10 000 habitats ont stabilisé leur DGP dans l’ensemble.

Des perspectives optimistes pour le futur

Plusieurs phénomènes expliquent le relâchement constaté. Concernant l’Etat, la poursuite du déploiement du progiciel Chorus au sein des ministères, qui s’est accompagné d’une profonde réorganisation des services en charge de l’exécution des dépenses depuis 2010, a perturbé le travail des services. Ce qui rend d’ailleurs les auteurs du rapport optimistes. Estimant que la phase d’apprentissage est en voie d’achèvement pour ceux qui utilisent Chorus, l’organisme table sur de meilleurs résultats en 2012, d’autant que le DGB des programmes ayant déjà basculé sur Chorus au 1er janvier 2010 montrent qu’il est divisé par deux dès que le système fonctionne convenablement. La création de services facturiers au sein de l’Etat, qui sont des centres de traitement et de paiement unique des factures placés sous l’autorité d’un comptable public, pour le compte d’un ou plusieurs services,  devrait également contribuer à réduire durablement le DGP. Dans le secteur public local, les  grandes collectivités territoriales ont un DGP à la hausse : 3 jours de plus pour les régions en moyenne nationale, 2 jours pour les grands établissements publics de santé, et un jour de plus pour les villes de plus de 10 000 habitants. Selon le rapport, « les difficultés financières rencontrées par certains organismes, en particulier les hôpitaux publics […] constituent un facteur avéré de la hausse du DGP des collectivités locales en 2011 ». Là encore, l’Observatoire mise sur une amélioration de la situation grâce au déploiement total du progiciel Hélios qui automatise les chaînes de traitement des dépenses, entre les collectivités et le contrôle de légalité, et grâce à la dématérialisation des pièces comptables et justificatives (projet ACTES).

Mais une situation enlisée

La prudence doit cependant rester de mise. Car le programme Hélios fait grincer des dents dans de nombreux établissements publics et collectivités. Quant à  ACTES, l’application qui permet de télétransmettre les documents vers le contrôle de légalité, et  qui est censée être totalement déployée sur le territoire, les chiffres révèlent que moins d’une collectivité et d’un établissement public local sur cinq l’utilisent cette application (1). A la CGPME, (Confédération générale des PME) on déplore la dégradation de la situation : « Globalement, on constate un enlisement. Le respect des délais de paiement n’est plus une priorité et on voit réapparaître le DGP comme l’une des premières causes de plainte des PME, regrette Frédéric Grivot, le vice-président de la Confédération et membre de l’Observatoire des délais de paiement. C’est très dommageable car les délais de paiement sont un gage de crédibilité de la LME [loi de modernisation de l’économie]. Nous avions espoir que la signature de certaines chartes de bonnes conduites amélioreraient la situation mais les fournisseurs continuent d’être payés avec un lance-pierre ». Selon l’expert, le secteur hospitalier demeure un secteur préoccupant : « Je connais une société de nettoyage qui est toujours payée à 150 jours dans un établissement de Martinique dont je tairais le nom ! », s’emporte-t-il. Plus que jamais, ce patron d’une entreprise de cartonnerie conseille aux PME de ne pas dépendre à plus de 30% d’un seul et même client.