Eviction irrégulière : pas d’indemnisation en cas d’abandon de procédure

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Tout candidat irrégulièrement évincé d'une procédure d'attribution d'un contrat public peut être indemnisé de son manque à gagner s'il a une chance sérieuse d'emporter le contrat. En revanche, il ne peut prétendre à une telle indemnisation si la personne publique renonce à conclure le contrat pour un motif d'intérêt général.

Dorénavant un candidat à l’attribution d’un contrat public, irrégulièrement évincé, peut obtenir réparation de son préjudice. En 2003 dans l’arrêt Groupement d’entreprises solidaires ETPO Guadeloupe, le Conseil d’Etat a posé, en matière de marché public, les bases de cette réparation. Dans un arrêt du 19 décembre 2012, il a étendu cette solution aux délégations de service public. Ainsi, « lorsqu'un candidat à l'attribution d'un contrat public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce contrat, il appartient au juge de vérifier d'abord si le candidat était ou non dépourvu de toute chance de remporter le contrat ; que, dans l'affirmative, il n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, il a droit en principe au remboursement des frais qu'il a engagés pour présenter son offre ; qu'il convient, d'autre part, de rechercher si le candidat irrégulièrement évincé avait des chances sérieuses d'emporter le contrat conclu avec un autre candidat ; que, dans un tel cas, il a droit à être indemnisé de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre, lesquels n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique ». Il ajoute « qu'en revanche, le candidat ne peut prétendre à une indemnisation de ce manque à gagner si la personne publique renonce à conclure le contrat pour un motif d'intérêt général ».

Le rejet de l’indemnisation

Contrairement à son rapporteur public, Bertrand Dacosta, la haute juridiction rejette le pouvoir de l’ancien délégataire de la commune de Cavalaire-sur-Mer contre la décision de la CAA qui a annulé la condamnation de la ville à lui verser 89 000 euros pour perte de chance sérieuse. Sur la base du dernier élément du considérant de principe, le CE indique « qu'eu égard à la date d'échéance de la concession, le 31 décembre 2004, la commune n'avait pas relancé la procédure de délégation de service public initialement engagée pour la durée restant à courir, annulée pour la seconde fois par ordonnance du 30 avril 2003, et que le lot auquel M. A était candidat n'avait alors pas été réattribué ; qu'elle a pu en déduire, sans contradiction de motifs, que M. A, bien qu'irrégulièrement évincé des procédures initialement engagées et disposant alors d'une chance sérieuse de l'emporter, ne pouvait prétendre à l'indemnisation d'un manque à gagner pour la période antérieure au 31 décembre 2004 ». S’agissant de la période postérieure au 31 décembre, là encore le CE estime puisqu’aucune procédure de DSP n’a été lancé, la société n’a été évincée d’aucun contrat et qu’elle ne peut prétendre à l’indemnisation d’un manque à gagner.