Commande publique : tellement présente…

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"La clarté, c'est une juste répartition d'ombres et de lumière"
Goethe


« En apprenant à mieux communiquer avec des non-juristes, la direction de la commande publique gagne en visibilité, et donc en pouvoir et en influence au sein de son organisme » nous explique cette semaine Me Sophie Lapisardi (Cabinet Lapisardi Avocats- Présidente de Lexclair). Son propos : montrer à quel point les directions commande publique ont tout intérêt à adopter ce "mode de pensée" que constitue le Legal Design (lire "Pourquoi le Legal Design est incontournable pour une direction de la commande publique").
 

La commande publique tient salon

En cette semaine marquée par le Congrès des maires (organisé par l’Association des maires de France) et le Salon des maires et des collectivités locales (organisé par Infopro Digital), osons le parallèle. Et si les politiques adoptaient le Legal design pour parler d’achat local ?
Suivons Me Lapisardi : « C’est un changement d’état d’esprit qui, non seulement ne fait pas perdre en rigueur, mais au contraire, permet de délivrer une information juridique de plus grande qualité pour communiquer l'information juridique de manière claire, efficace, engageante et percutante
De façon "claire" ... Le discours commun des "politiques" n'est en réalité pas des plus clairs, ni clairement affiché.
 

Leitmotiv

Certes, on repère assez vite le leitmotiv de base : "la commande publique représente XX % du PIB, XXX milliards d’euros." Volontairement, nous ne mentionnons pas ici de chiffres : ils changent, suivant la conjoncture… et les interlocuteurs.
Mais retenons le message essentiel : "la commande publique, même si cela est compliqué (lire "Achat local : « Se débarrasser des grains de sable et des cailloux dans la chaussure »")  c’est important ; c’est de l’argent public et donc un levier efficace, pertinent et légitime pour : (choisissez le ou les objectif (s) qui vous conviennent) : relancer l’économie (consultez notre dossier "Relancer la commande publique. Oui, mais comment ?") ; préserver notre planète (consultez notre dossier " Loi "Climat et résilience" : vers le verdissement des achats !") ; mener une politique d’inclusion, favoriser l’Economie sociale et solidaire (lire "Difficultés d’insertion des entreprises de l’ESS dans la commande publique") ; mieux se nourrir, voir même préserver les principes républicains (consultez notre dossier "L’acheteur public au secours des principes républicains").
 

Le local à la barre

Nous avons recensé cette semaine de nombreuses initiatives, principalement locales, qui cochent quasiment toutes les cases.
A commencer par la collectivité lauréate "Coup de cœur" du jury des Trophées de la commande publique 2021 (organisés par achatpublic.com en partenariat avec le ministère de la Transition écologique) : « Même si, avec 10,5 M€ par an, le volume d’achat de la communauté d’agglomération Arles Crau Camargue Montagnette (ACCM) est près de dix fois inférieur au seuil fixé pour imposer l’élaboration d’un schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (Spaser), toutes les qualités nécessaires sont pourtant réunies dans cette opération. » Il s’agit d’un marché de services dont l’objet principal est l’insertion socioprofessionnelle ; il a pour support d’activité la collecte des objets encombrants en mode de déplacement doux (des chevaux) (lire "Achat durable : un trophée “Coup de cœur” pour les chevaux de l’ACCM").

Autre démarche mise en avant cette semaine : l’association des coordonnateurs d’établissement public local d'enseignement (EPLE) de Nouvelle Aquitaine (ACENA) continue à faire évoluer son application web pour évaluer et noter la qualité nutritionnelle des produits proposés par les soumissionnaires (lire "Une appli nutri-score pour l'achat de denrées alimentaires qui satisfait les acheteurs comme les entreprises"), avec un gain d’objectivité et de temps.

Enfin, un coup de chapeau aux agents des collectivités territoriales (lire "Achat durable : « Face aux enjeux, les agents font preuve d’imagination »") : si « l’acheteur doit désormais sortir de sa zone de confort, et acquérir de nouveaux réflexes pour un achat public durable (...) Rien ne peut se faire si les "techniciens" ne soutiennent pas la démarche
 

Communications politiques

Question communication, la commande publique est, pour nos politiques en campagne, un bon sujet. Et ce, plus particulièrement à l’occasion salon du "Made in France". Sans surprise, l’idée qui ressort de façon assez mécanique : "Réserver tant XX % (là encore, inutile d’énumérer les variantes) des marchés publics à des entreprises françaises … ou fixer des segments achats par essence à réserver à nos entreprises nationales. Rien de nouveau, en réalité (relire "Le grand jeu de la commande publique électoraliste est ouvert"). Des propositions teintes de localisme, voire de souveraineté nationale.
Deux ennemis sont alors identifiés : d’un côté, la complexité du droit de la commande publique, sur laquelle y a peut-être lieu de débattre, mais à condition aussi de s'avoir s'interroger sur l’origine de la complexité (relire "Une commande publique en cours d’inversion") ; de l’autre, l’Europe. Là, les politiques ne répondent en réalité que rarement aux discours anti-européens, voire les soutiennent. Assez souvent, interrogés par les parlementaires sur des questions d’achat local contre par le droit, le gouvernement semble répondre « Oui, nous comprenons... mais voyez-vous...comment dire ? Il y a le droit de la commande publique, qui est européen ; on y peut rien … ».
 

« Pas l’un sans l’autre »

Alors apprécions le discours de clarté de la secrétaire d’État chargée de l'Économie sociale, solidaire et responsable, Olivia Grégoire, dans nos colonnes (lire "Olivia Grégoire : "L’acheteur public sait que ses choix ont un impact sur son environnement"). Elle assume un discours assez direct, qui dépasse le prisme du « souverainisme » dans l’achat public : « Les règles européennes sur les marchés publics sont souvent mises en cause. Mais j’aimerais qu’on parle aussi souvent des protections qu’elles nous garantissent que des freins qu’elles peuvent provoquer car il est difficile d’avoir l’un sans l’autre. »