Hauts-de-Seine et Yvelines : le pari gagnant de la mutualisation

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Lauréate des trophées de la commande publique 2021, la direction de la commande publique unifiée des conseils départementaux des Yvelines et des Hauts-de-Seine poursuit son déploiement. La rédaction est allée à la rencontre de son directeur, Nicolas Lallemand, qui revient sur les modalités de cette mutualisation. Mais également sur la mise en place du premier SPASER interdépartemental et la labellisation "Relations fournisseurs et achats responsables" (RFAR).

Les conseils départementaux des Yvelines et des Hauts-de-Seine sont parmi les lauréats de l'édition 2021 des Trophées de la commande public, réalisés en partenariat par achatpublic.com et le ministère de la Transition écologique, dans la catégorie "Achat performant". Le jury a salué la mutualisation entre les services des deux départements qui se déploie depuis 2019, avec notamment et tout récemment le développement de logiciels communs de gestion et un système d’information partagée.

Depuis les trophées, explique Nicolas Lallemand, les deux départements ont adopté un SPASER (interdépartemental, donc !). Le label RFAR, (Relations Fournisseurs et Achats Responsables) a été obtenu le même jour que le SPASER, le 17 décembre ; pour les Hauts de Seine. Pour les Yvelines, le dossier sera déposé au premier trimestre 2022.
Selon le "directeur mutualisé", «Nous sommes au rendez-vous, la mutualisation a été effective dès 2019. L’harmonisation des processus est arrivée à son aboutissement début 2022, avec le déploiement pour l’ensemble des directions des processus commande publique et le SI Achat paramétré à partir de ces processus.»
 
Quels ont été les facteurs facilitateurs à la mutualisation ?
nicolas_lallemand.jpgNicolas Lallemand - Cela a été un projet porté politiquement par les deux présidents des conseils départementaux, Patrick Devedjian et Pierre Bedier. Ils ont développé ce projet de convergence entre les deux départements avec la commande publique en première direction mutualisée. Un autre facteur facilitateur est à souligner : l’adhésion des équipes. Elles y ont été associées, aussi bien celles de la commande publique que les directions opérationnelles, dès le début du projet. Ce dernier est basé sur la communication et la contribution de tous à l’élaboration de ces nouveaux processus.

La difficulté est de réussir à mener un projet de transformation tout en ayantune activité de passation de marchés qui demeure très soutenue

Au rang des freins, la conduite du changement a été un point de vigilance. En effet, elle induit toujours la peur de disparaître ou d’être absorbé. Nous l’avons surmontée avec une large concertation.
Autre difficulté, les acheteurs sont très recherchés au niveau des collectivités, en particulier en Ile-de -France. Nous rencontrons parfois des difficultés à recruter. La difficulté est aussi de réussir à mener un projet de transformation tout en ayant une activité de passation de marchés qui demeure très soutenue. 

Au-delà de ces deux points, je n’identifie pas tant de freins que cela, tant au niveau de la commande publique que des directions opérationnelles. Ces dernières nous ont spontanément proposé des projets de groupement de commande. Il y en a de plus en plus, 5 de plus cette année.
 
La mutualisation de la commande publique est-elle une première étape vers la mutualisation des départements eux mêmes ?
Nicolas Lallemand - Au départ, il y avait bien un projet de fusion, connu et porté par les deux présidents. Cette fusion, qui nécessitait un accord de l’Etat, n’a pas eu lieu et ce projet n’est donc plus à l’ordre du jour. Toutefois, la convergence est maintenue et poursuivie. Nous continuons à travailler avec deux pouvoirs adjudicateurs. En 2021, nous comptabilisions 33 segments d’achat passés en groupement de commande, 5 de plus qu’en 2020. On continue à élargir les marchés passés en commun par les deux collectivités. Ce qui a été réalisé ne sera pas défait ! 
 
La mutualisation n’engendre-t-elle pas un risque d’acheter plus loin du terrain et du local ?
Nicolas Lallemand - Nous sommes très vigilants sur ce point.

Notre SPASER met en avant 4 axes, 4 valeurs : la solidarité ; la proximité ; l’achat durable et décarboné et la performance et l’efficience.
La proximité est un élément très important. La commande publique ne peut exister que si elle s’appuie sur un tissu économique local vivant et dynamique. Nous avons de la chance, nous sommes dans les Hauts-de-Seine et les Yvelines, départements bénéficiant d'un tissu économique encore assez fort.
Nous avons mis en place des réunions fournisseurs afin d’aller à leur contact et leur présenter la programmation de nos marchés. Dans notre SPASER, nous avons prévu de renforcer la sensibilisation et l’accompagnement des opérateurs économiques locaux, non pour rompre l’égalité de traitement qui doit persister mais les inciter à répondre à nos consultations.

Notre SPASER met en avant 4 axes, 4 valeurs : la solidarité, la proximité, l’achat durable et décarboné et la performance et l’efficience

Notre cible, ce sont les TPE/PME. A chaque fois que nous créons un groupement, nous étudions l’opportunité de le faire. Nous avons déjà pris la décision de ne pas le faire après une analyse du secteur. Nous faisons parfois des procédures avec des lots géographiques pour, au niveau de la définition du besoin, à travers le sourcing, ne pas pénaliser les TPE/PME.

Quelles sont les actions fortes du SPASER ?
Nicolas Lallemand - Il s’agit du premier SPASER interdépartemental.
Nous avons un projet de création d’une cellule contact, pour que les opérateurs économiques puissent se renseigner sur la commande publique. Nous voulons aussi faire évoluer le langage employé dans les dossiers de consultation, être moins techniques et plus compréhensibles par des opérateurs économiques qui ne connaissent pas la commande publique. L’idée est de se rapprocher des conditions générales de vente plutôt que du CCAG. Nous sommes en train de construire la feuille de route.

Nous avons des objectifs ambitieux en matière de clauses sociales et environnementales. Dès 2022, nous visons le seuil de 30 % de clauses d’insertion, seuil fixé pour 2025 par le PNAD. Nous voulons développer les marchés réservés, atteindre 75 % de clauses environnementales, 100 % en 2023. Nous étions à 58 % en 2021.

Enfin, nous mettons en place un parcours de formation pour développer la professionnalisation de nos acheteurs, en lien avec le CNFPT.

Vous êtes labellisé RFAR, qu’est-ce que cela implique ?
Nicolas Lallemand - Nous étions déjà labellisés pour les Hauts-de-Seine depuis 2017 avec le label RFAR, qui distingue les entreprises ou collectivités territoriales qui développent des relations équitables avec leurs fournisseurs. Cela concernait davantage le secteur privé. Ce label a évolué pour devenir en 2021 RFAR (Relations Fournisseurs et Achats Responsables). Il est attribué par le médiateur des entreprises du MINEFI et le Conseil national des achats sur la base de dossiers de candidature. La RSE a été introduite dans le label, notamment à travers la norme ISO 20400.
L’achat responsable consiste en la relation équitable entre le pouvoir adjudicateur et le titulaire du marché, mais aussi en l’intégration des normes sociales et environnementales.

Au 1er septembre 2021, les Hauts-de-Seine étaient le seul département labellisé LRFAR ; les Yvelines seront le second !

Ce label est plutôt réservé à des acteurs qui interviennent dans le champ concurrentiel. Au 1er septembre 2021, nous étions le seul département labellisé, les Yvelines seront le second.

Les Hauts-de-Seine et les Yvelines ont déposé deux dossiers, sur la même base. Celui des Hauts-de-Seine est un renouvellement. Pour les Yvelines, ce sera une première. Les engagements sont les mêmes, sur la base du SPASER interdépartemental. Le label et le SPASER s’autoalimentent.
Une enquête fournisseurs est prévue en 2022. Nous menons un pilotage global de notre politique achat. Nous évaluons les performances RSE de nos fournisseurs et l’impact environnemental de nos achats à travers le coût du cycle de vie. Ce label nous oblige à nous rapprocher des méthodes du secteur privé.

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