Le Conseil d'Etat maintient le seuil de 25.000 €

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Suivant les conclusions du rapporteur public, Olivier Henrard, le Conseil d’Etat a rejeté par une décision rendue le 17 mars 2017, la demande d’annulation du seuil de 25.000 présenté par maître Franck Perez, avocat au barreau de Marseille. Il a, en revanche, sanctionné le 4ème alinéa de l’article 142 du décret marchés publics en tant qu’il prévoit que « la saisine du médiateur des entreprises interrompt le cours des différentes prescriptions. »

L’avocat marseillais, Franck Perez n’aura pas réussi à convaincre une seconde fois le Conseil d’Etat d’annuler le seuil des petits achats. Par une décision rendue vendredi, la haute juridiction a refusé de faire droit à sa demande. L’avocat demandait précisément l’annulation de l’article 29 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics et du 8° de l’article 30. S’agissant de l’article 29, le requérant soutenait que cette disposition exonère les marchés de représentation légale ou les marchés de conseils pouvant déboucher sur une procédure contentieuse du respect des règles générales de l’article 1er de l’ordonnance du 23 juillet 2015. Pour rejeter l’argument, le CE relève que ces « deux catégories de services juridiques ne sont pas au nombre de celles qui sont exclues du champ d’application de l’ordonnance du 23 juillet par le 10° de son article 14. » Dès lors, l’article 1er de l’ordonnance leur est donc applicable. De plus, l’article 29 en cause précise que la passation de ces marchés de services juridiques est soumise à une obligation de publicité et de mise en concurrence. S’il appartient au pouvoir adjudicateur d’en définir librement les modalités, celles-ci doivent être déterminées en fonction du montant et des caractéristiques du marché.

Une dispense de procédure encadrée

Les marchés inférieurs au seuil de 25.000 € peuvent être négociés sans publicité ni mise en concurrence. L’avocat marseillais estime que cette faculté méconnait les principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. Les sages du Palais royal balayent l’argument. L’objectif de cette disposition est d’éviter aux acheteurs de se voir imposer, pour des montants peu élevés, le recours à des procédures « dont la mise en œuvre ne serait pas indispensable pour assurer l’efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics et qui pourraient même, en certains cas, dissuader des opérateurs économiques de présenter leur candidature. » Depuis le décret du 9 décembre 2011, la possibilité de s’affranchir des règles de publicité et de mise en concurrence pour les petits achats est encadrée. Ainsi, « l’acheteur doit veiller à choisir une offres pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin ». Ces garanties ont été reprises au 8° de l’article 30 du décret. Les dispositions en cause ne méconnaissent pas les principaux fondamentaux de la commande publique.

Ordre des avocats de Paris : une satisfaction partielle

Le décret était également attaqué par l’ordre des avocats de Paris. Ils demandaient l’annulation de l’article 142 qui, selon eux, engendre un monopole au profit de la Médiation des entreprises pour tous les différends concernant l’exécution des marchés publics. « Non », répond la haute juridiction. « Les cocontractants d’un marché public demeurent libres de recourir au médiateur de leur choix. » De plus, en donnant aux acheteurs et aux entreprises, la possibilité de recourir au médiateur, les dispositions en cause se sont bornées « à mettre en œuvre la mission d’intérêt général, qui relève de l’Etat, de développer les modes alternatifs de règlement des litiges, corollaire d’une bonne administration de la justice. » il n’y a donc pas méconnaissance des principes de liberté du commerce et de l’industrie et du droit de la concurrence.

L’ordre estimait en outre que l’interruption des prescriptions et des délais de recours contentieux en faveur de la Médiation des entreprises créait une rupture d’égalité puisque les autres médiateurs ne bénéficient pas de cet avantage. Sur ce point, le CE les a suivis. La fixation d’un délai de prescription pour l’action en paiement d’une créance est un principe fondamental des obligations civiles. Or en la matière, seul le législateur est compétent. « L’article 142 est entaché d’illégalité en tant qu’il dispose que la saisine du médiateur des entreprises ou d’un comité consultatif de règlement amiable interrompt le cours de différentes prescriptions. » Toutefois, la requête ne concerne que le médiateur des entreprises. Le 4ème alinéa de l’article 142 n’est donc annulé qu’en « tant qu’il prévoit que la saisine du médiateur des entreprises interrompt le cours des différentes prescriptions ».