Rémy Schwartz : « les possibilités d’action en référé contractuel sont relativement restreintes »
Au fil des jurisprudences, le Conseil d’Etat continue de décoder les dispositions relatives au référé contractuel. La dernière en date précise la méthode d’utilisation par le juge de la palette des pouvoirs mis à sa disposition. Rémy Schwartz, président de la 7ème sous section du contentieux du Conseil d’Etat, a accepté de nous dire un peu plus sur les raisons qui ont conduit à ces évolutions jurisprudentielles.
Juge du référé contractuel : une palette de pouvoirs extrêmement large
« Ce considérant s’applique uniquement lorsque le juge fait application de l’article L.551-20 du CJA, c’est-à-dire lorsqu’il y a une méconnaissance du délai de stand still ou de suspension sans qu’il y ait de manquement de nature à léser le requérant», précise Rémy Schwartz, président de la 7ème sous-section du contentieux du Conseil d’Etat. Pour les lots 3 et 4, la juridiction relève qu’en classant seconde l’offre de la requérante, alors qu’elle aurait du être classée première, le CH a manqué à ses obligations de mise en concurrence, d’une manière ayant affecté les chances de la société d’obtenir le marché. L’annulation, sur le fondement de l'article L.551-18 du CJA, est donc de mise avec effet différé de quatre mois. « Lorsqu’il se fonde sur l’article L.551-18, il conclut normalement à la nullité du contrat. Toutefois, si le prononcé de la nullité se heurte à une raison impérieuse d’intérêt général, il peut prendre une des mesures alternatives prévues à l’article L.551-19 du CJA (résiliation, réduction de durée, pénalité financière)», ajoute-t-il.
La nécessité de préciser les dispositions applicables au référé contractuel montre que tout n’est pas si clair. « La mise en œuvre du référé contractuel, créé par l’ordonnance du 7 mai 2009, est complexe. En outre, comme tout texte neuf, il appartient à la jurisprudence de l’interpréter ce qui prend beaucoup de temps. Nous avançons étapes par étapes», confie le président.
Référé contractuel et MAPA
Step by step, c’est ce qu’à fait la haute juridiction au cours de l’année 2011. De grand port maritime du Havre (3), à la commune de Maizières-lès-Metz (4) en passant par Opievoy (5), le Conseil d’Etat a délivré un mode d’emploi de l’utilisation de ce recours, en donnant parfois l’impression de verrouiller les cas d’ouvertures du référé, notamment en MAPA. « Le référé contractuel est un référé d’exception. Les cas d’ouverture sont très encadrés, en particulier en procédure adaptée (6). Le texte a une portée très stricte, les possibilités d’action sont relativement restreintes. Il faut interpréter le texte utilement, nous ne pouvons pas faire des miracles, observe Rémy Schwartz. L’article L.551-18 du code de justice administrative pose les conditions. Sur les trois alinéas, seul le premier, s’applique aux MAPA. Il n’y a que l’absence de publicité qui pourra justifier une annulation du marché», précise-t-il. Si seul le défaut de publicité peut donner lieu à une sanction, quid d’un candidat qui se fonde sur d’autres manquements ? Doit-on laisser perdurer des situations irrégulières ? « Sur ce point il existe un trou noir », avoue le président. Finalement, on voit bien que de nombreuses zones d’ombre demeurent encore sur ce texte. La construction débutée par le Conseil d’Etat est bien loin d’être achevée…
(1) CE 10 novembre 2010 France Agrimer
(2) CE, 30 novembre 2011, société DPM protection, 350788, 350792
(3) CE 19 janvier 2011 Grand port maritime du Havre
(4) CE, 30 septembre 2011, commune de Maizières-lès-Metz, 350148
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