La lettre d'achatpublic.info n°544

  • 15/05/2015
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Il a beau être discret, c'est une star à sa façon. Le juge administratif est, malgré lui, une vedette anonyme que tout le monde lit et écoute. Son visage est inconnu et nul ne pourrait se plonger dans la profondeur argentique de ses traits sur grand écran pour y déceler son émotion, ses tourments et ses joies. Car ce n'est pas sur pellicule, mais sur papier, que l'on peut sonder ses sentiments, au travers de ses ordonnances. Le scénario n'est pas toujours à la hauteur des attentes des acteurs de l'histoire, ni des spectateurs, mais il faut bien s'y plier ou taper à la porte du scénariste en chef pour tenter de modifier le dénouement de l'intrigue. En cette quinzaine de festival, cet auteur à succès propose trois récits tout à fait palpitants et singuliers, comme on en espère à chaque édition. Le premier narre la déconvenue d'un hôpital, quelque peu versatile, qui a lancé un marché « dissident » pour des besoins déjà couverts par un groupement de commandes dont ledit hôpital est membre. Cette audace artistique n'est pas passée auprès du juge, lequel a estimé que le pouvoir adjudicateur a méconnu les obligations qui pesaient sur lui du fait de son appartenance au groupement de commandes (lire notre article). La fin n'est pas plus heureuse pour la ville de Romilly sur Seine, au cœur d'un récit opposant élus de la majorité et de l'opposition à propos de la prolongation d'une DSP. Dans cette fable politique, le juge a annulé la délibération autorisant le maire à poursuivre d'une année la délégation, 20 mois avant l'échéance, afin de laisser le temps à la commune de réfléchir à sa stratégie de gestion (lire notre article). Egalement en sélection dans cette quinzaine, une peinture sociale retrace le combat d'un syndicat intercommunal face à l'âpreté d'une société d'assurance qui refuse le paiement d'une indemnisation, dans le cadre d'un marché dont l'exécution a démarré avant sa notification. Le conseil d'Etat, star parmi les stars, scelle cette (més)aventure par un clap de fin optimiste : commencer à exécuter un marché avant sa notification est certes une irrégularité. Pour autant, elle n'est pas d'une gravité telle que le juge administratif doit écarter le contrat pour régler le différend (lire notre article). Enfin, en parallèle des festivités, la semaine de la critique pose un certain regard forcément original et captivant sur les avenants (« contrainte ou souplesse ? »), tels qu'ils seront traduits en droit français (lire notre article), et sur une récente décision des sages du Palais Royal concernant l'annulation d'un PPP dont la mission globale a été factionnée (lire l'invité du jeudi). La sélection de cette 544ème édition est terminée. Je vous souhaite une belle projection. Qu'elle vous procure du plaisir et de l'émotion !
Sandrine Dyckmans, en direct de Cannes