
Le juge va-t-il pouvoir annuler la résiliation d’un contrat ?
Le Conseil d’Etat pourrait revenir sur sa jurisprudence relative aux questions d’indemnisation des cocontractants lorsque la personne publique a décidé de résilier unilatéralement un contrat administratif. Pour plus de cohérence avec les jurisprudences Tropic et commune de Béziers sur l’élargissement des pouvoirs du juge.

Actuellement, le juge administratif ne peut pas, sauf exceptions, prononcer l’annulation de la résiliation d’un contrat administratif à la demande du cocontractant. Il peut seulement accorder à celui-ci une indemnisation. La première jurisprudence en la matière date de … 1868. Ce principe, certains l’ont qualifié de « fossile juridique »… Le 4 mars, lors de l’examen par le Conseil d’Etat d’un autre volet de l’affaire commune de Béziers (qui a donné son nom à la jurisprudence du 28 décembre 2009 sur la loyauté des relations contractuelles), le rapporteur public Emmanuelle Cortot-Boucher a proposé de revenir sur cette jurisprudence ancestrale pour « moderniser et adapter l’office du juge » au regard des évolutions récentes que représentent les jurisprudences Tropic et Béziers. Celles-ci ont fourni aux magistrats une palette de pouvoirs élargis. Pourquoi alors le juge ne pourrait-il pas aussi être en mesure d’annuler une décision de résiliation d’un contrat prise unilatéralement par une personne publique ? Il existe déjà de nombreuses exceptions à ce principe (pour les concessions, les conventions d’occupation du domaine public, etc). « Il n’est pas facile de trouver une cohérence entre le principe et les nombreuses exceptions » a d’ailleurs fait remarquer le rapporteur public à l’appui de sa démonstration. Deuxième reproche à l’encontre de cette vieille jurisprudence : elle donne un pouvoir « exorbitant » à une administration qui ferait un usage illégal de la résiliation ce qui empêcherait parfois l’indemnisation de certains préjudices « hors normes » car non pris en compte. Enfin, cette jurisprudence « aux allures baroques » ne conviendrait pas à une gestion rationnelle des deniers publics, la résiliation d’un contrat obligeant l’administration à avoir recours à un second cocontractant…
« Le juge intervient dans les contrats »
Bref, pour Emmanuelle Cortot-Boucher, il devient « difficile de maintenir la jurisprudence Goguelat » de 1868. Depuis Tropic et Béziers, « le juge intervient dans les contrats » (il peut pas exemple modifier certaines clauses). Il est donc grand temps, pour la magistrate, qu’il puisse aussi intervenir sur les mesures de résiliation. Mais le rapporteur public s’est montré réticent à accorder au juge un pouvoir d’annulation radical, « car le terme d’annulation est ambigu ». Mme Cortot-Boucher propose une autre solution : « Le juge doit dire quels sont les droits des parties et si les relations contractuelles peuvent reprendre ». Lorsqu’il est saisi d’une demande de reprise des relations contractuelles, le juge doit prononcer la date de reprise (optique de relations futures). Mais selon le rapporteur public, le Conseil d’Etat n’aurait pas intérêt à priver le juge de ses nouveaux pouvoirs pour la seconde hypothèse où le contrat se serait poursuivi après la résiliation du contrat (optique des relations passées par rapport à la date à laquelle le juge statue)… Quant à la saisine du juge, le rapporteur public propose qu’elle soit circonscrite à un délai de deux mois (sans notification obligatoire) à partir de la date à laquelle le cocontractant a été informé de la décision de résilier le contrat (à l’image de ce qui a été institué avec Tropic).
Ordonner la reprise des relations contractuelles ?
Une fois la nature des pouvoirs du juge définie, le rapporteur public a proposé plusieurs outils pour qu’un magistrat puisse trancher. Premièrement, il pourrait voir si la demande est devenue sans objet, dans l’hypothèse où le contrat aurait été complètement exécuté à la date à laquelle il statue ou celle où la situation aurait été régularisée de fait. Deuxièmement, si la demande n’est pas devenue sans objet, le juge devrait tirer les conséquences de la mesure de résiliation (comme il le fait avec Tropic et Béziers) en regardant s’il existe un vice et, si c’est le cas, en examinant le degré de gravité de celui-ci. Un vice grave pourrait en effet compromettre la reprise de relations contractuelles… Cette nouvelle palette ne pourrait pas ne pas être assortie de la possibilité pour le requérant de faire usage d’une demande de suspension provisoire de la mesure au titre de l’article L521-1 du code de justice administrative (comme c’est déjà le cas pour Tropic), selon le rapporteur public. Cela « est absolument nécessaire pour ne pas créer de fausse fenêtre pour le cocontractant ». Sinon l’administration pourrait prévoir une solution pour que le contrat résilié puisse se poursuive avec un autre cocontractant… La suspension en urgence permettrait de laisser ouverte la possibilité d’une reprise des relations contractuelles. Elle ne pourrait être prononcée qu’en cas de vice grave et lorsque la mesure de résiliation met en péril la survie économique du cocontractant. Le rapporteur public en a convenu, ordonner la reprise des relations contractuelles sera « rare ». Le juge accordera généralement une indemnisation. Mais garder ce pouvoir n’est « pas inutile, pour Emmanuelle Cortot-Boucher, car il permettrait de dissuader l’administration d’adopter un comportement inacceptable ». Réponse des sages du Palais-Royal dans quelques jours…


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