L’absence de cause dans un contrat devant le conseil d’Etat
Les sages du Palais Royal vont devoir se pencher, dans les semaines à venir, sur la question de l’absence de cause dans un contrat, à l’occasion d’un contentieux opposant un prestataire de location de photocopieurs à un collège public qui a cessé de payer les loyers de ses copieurs au motif qu’il y avait absence de cause dans le contrat litigieux. A cette occasion, le rapporteur a rappelé qu’un contrat est supposé nul lorsque, pendant sa formation, la contrepartie à laquelle la partie s’engage est illusoire. Ce qui n’était pas le cas dans l’affaire examinée.
A cette date, l’établissement scolaire signe un nouveau contrat portant sur la location de deux copieurs et la mise à disposition d’un standard téléphonique pour cinq ans, avec la société Grenke location, qui lui a de surcroît octroyé la somme de 25 000 euros pour financer le coût de la résiliation anticipée des marchés précédants. Le problème, c’est que le collège n’a pas effectué cette résiliation et s’est retrouvé, de ce fait, à devoir payer deux loyers différents pour le même service. Constant ce doublon, l’établissement a cessé de payer le matériel à Grenke Location, en avançant qu’il y avait absence de cause, rendant le contrat illicite. La société requérante a contesté ce moyen et demandé le remboursement des dépenses qui ont été utiles au collège, ainsi que le paiement des sommes exposées pour l'exécution du contrat et les gains dont elle a été privée, en raison de la faute commise par le collège.Aucun contrat ne peut exister si l’individu qui s’engage n’en retire aucun intérêt
Démontrer l’absence de contrepartie
Dans le cas d’espèce, y a-t-il eu réellement absence de cause? Pour Gilles Pellissier, le rapporteur public, la réponse est non. Pour qu’il y ait absence de cause, il faut qu’il y ait eu une erreur et l’absence de contrepartie : « L’article 1169 [du code civil] dispose qu’un contrat est supposé nul lorsque, pendant sa formation, la contrepartie à laquelle la partie s’engage est illusoire », a rappelé Gilles Pellissier. Or, dans le marché litigieux, il y a eu « une contrepartie entendue » pour le collège : celle de faire des économies. La personne publique a conclu en toute connaissance de cause un nouveau contrat correspondant à la location de deux copieurs avec un avantage financier à la clé. Elle était tout à fait consciente de l’existence d’une contrepartie avantageuse pour elle.Le paiement de deux loyers pour le même service résulte, selon le rapporteur public, de l’absence de résiliation du contrat précédent. D’abord, le contrat n’a pas exactement le même objet que le précédent, a argué le rapporteur. Ensuite, l’acheteur n’ignorait pas qu’il bénéficie de la prestation acquise. Déjà locataire des deux photocopieurs, son nouveau contrat avait pour objet de remplacer les contrats antérieurs afin de bénéficier de la même prestation pour un loyer réduit. L’opération devait représenter une économie de 15% pour le collège. Il a conclu un nouveau contrat avec une nouvelle société, ce qui lui a permis de faire des économies sur une prestation qui devait se poursuivre au-delà du cadre des contrats en cours. « L’erreur commise ne porte pas sur l’inexistence d’une contrepartie dont [le collège] était parfaitement conscient, mais sur le calcul des avantages qu’il pouvait retirer de l’opération et sur son exécution qui impliquait de résilier immédiatement les contrats en cours. Dans ces conditions, en retenant de l’absence de cause du contrat qui portait des matériels dont il disposait déjà dans des contrats antérieurs, sans rechercher si les conditions de cette location ne lui conduisait pas à une prestation différente, la CAA de Nancy [qui avait conclu à l’absence de cause] a commis une erreur de droit. » Aux sages maintenant d’en décider.Il y a eu une contrepartie entendue pour le collège
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