
Montauban se noie dans le critère création d’emplois
Le Conseil d’Etat vient de confirmer l’annulation des procédures de passation de deux DSP pour la distribution d’eau et l’assainissement lancées par la ville de Montauban. Principal reproche : avoir choisi son délégataire en fonction d’un critère de création d’emplois sans rapport avec l’objet du marché.

Le maire de Montauban (57 300 habitants, Tarn-et-Garonne) croyait sans doute bien faire en négociant des créations d’emplois contre la conclusion des deux DSP pour l’eau et l’assainissement. Mais la démarche a eu seulement pour effet de faire couler l’ensemble. Le 24 mars, le Conseil d’Etat n’a même pas admis son pourvoi en cassation (ni celui de Veolia Eau, le délégataire choisi) contre les ordonnances du juge des référés du TA de Toulouse annulant les deux procédures (1). Le règlement des deux consultations prévoyait que l’offre serait retenue en fonction « notamment » de trois critères : valeur technique de l’offre, ses aspects financiers et la qualité du service. L’utilisation du mot « notamment » était déjà bancale, mais en plus, au cours de la négociation avec les trois candidats (Veolia Eau, Saur, Lyonnaise des eaux), un autre critère est apparu. « Les créations d’emplois proposées par les candidats ont été directement ou indirectement prises en compte, au stade de l’analyse des offres initiales, dans le nombre de points attribués au titre des critères de la valeur technique des offres et de la qualité du service », constatait le juge en première instance (2). Première erreur.
Le paramètre création d’emplois
Autre problème : « le nombre d’emplois créés a été discuté dans le cadre de la phase de négociation en plein accord avec la commune »… Certes, il n’a pas été établi que cela ait été à sa seule initiative, mais le rapport du maire de la ville fait ressortir que l’évaluation globale des offres a bien été réalisée en partie sur ce paramètre de créations d’emplois. Pour essayer de convaincre le Conseil d’Etat, la ville de Montauban a attribué cette situation à la seule surenchère des candidats. Sans succès. Le délégataire choisi Veolia s’est, lui, appuyé sur d’autres arguments sans plus de réussite. Selon le géant de l’eau, le manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence n’était pas de nature à léser la Lyonnaise des eaux requérante contre les procédures puisque celle-ci avait été informée du critère de la création d’emplois, qu’elle avait été en mesure de modifier en conséquence son offre, mais surtout qu’elle avait été écartée non pas en fonction de ce critère mais sur d’autres aspects. Lors de l’audience de la haute juridiction le 10 mars, le rapporteur public Bertrand Dacosta avait démonté l’argument pour valider la position du juge toulousain. Selon, lui, un « critère qui n’est pas explicitement mentionné est susceptible de léser un candidat ». Et « ce n’est pas parce que l’offre de Veolia Eau était meilleure que celle de la Lyonnaise que l’on peut en déduire l’absence de lésion ».
Besoins de la délégation
Le pire pour Montauban fut sans doute que ce critère non annoncé était sans rapport avec l’objet du marché. « La majorité des emplois ainsi pris en compte résultent de l’implantation de structures sans lien direct avec le contenu de la délégation de service public faisant l’objet du litige ou excédant très largement les besoins d’une telle délégation, telles un centre de service clients « Handicall » destiné à fournir des renseignements sur les services publics dédiés à l’environnement en général pour la société Veolia Eau, ou le déplacement de centres de gestion de niveau régional pour les sociétés Saur et Lyonnaise des eaux », avait relevé le juge toulousain. Les trois candidats proposaient entre plusieurs centaines de créations d’emplois (Veolia en assurait 232, la Saur 220 et la Lyonnaise de 150 à 260). Or l’instruction a permis de découvrir que « le nombre total d’agents nécessaires au fonctionnement des deux délégations de service public (…) était de 34 ». Le juge des référés en avait conclu que la prise en compte de ce paramètre « sans rapport avec les besoins du service public délégué et donc sans lien avec l’objet du contrat » avait méconnu les principes de liberté d’accès à la commande publique et de transparence des procédures « qui s’appliquent aux délégations de services publics comme aux marchés publics ». Cela ne pouvait conduire qu’à l’annulation.
(1) CE 24 mars 2010, Veolia Eau, Compagnie Générale des eaux, Montauban, n°335783, 335782, 335823, 335824 CE 23 mars 2010 commune de Montauban (1012.71 kB)
(2) TA de Toulouse du 5 janvier 2010, Lyonnaise des eaux, n°0905678 et n°0905679 TA Toulouse, 5 janvier 2010, société Lyonnaise des eaux, 0905678 (375.11 kB) TA de Toulouse du 5 janvier 2010, Lyonnaise des eaux, n°0905679 (545.79 kB)
Bénédicte Rallu © achatpublic.info


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