Recrutement : le profil idéal de l’acheteur public (2)

  • 05/01/2012
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Après avoir sondé les chasseurs de tête sur le profil idéal de l’acheteur public (1), voici aujourd’hui le deuxième volet de notre enquête. Cette fois, ce sont les DRH de collectivités qui s’expriment. Dans le secteur public local, les jeux sont bien plus ouverts que ce que l’on pourrait croire. Les anciens salariés du privé sont appréciés, même si se pose la question de la rémunération.

Être gardien du temple ne suffit plus. Directeur général adjoint de la ville et de la communauté d’agglomération de Versailles en charge des ressources humaines, Étienne Desmet ajuste ses recrutements en fonction de la modification des enjeux : « Ce métier a incroyablement évolué en quelques années, nous avons dépassé aujourd’hui le seul contexte juridique pour nous orienter vers des cadres A qui disposent également d’un véritable talent de négociateur — je pense aux dialogues compétitifs — et qui offrent, en plus, une parfaite maîtrise de la sphère financière publique et privée, comme pour le suivi des DSP ». Responsable du recrutement au conseil général des Pyrénées-Orientales, Bernadette Guérin relève bien une évolution des profils recherchés, mais plutôt dans l’autre sens : « J’ai constaté une nette évolution résultant des différents contentieux, explique-t-elle, d’un profil plutôt financier jusqu’à présent, les collectivités territoriales privilégient aujourd’hui le profil de juriste pour leurs recherches de responsables de la commande publique ». « Nous sommes là dans un métier émergeant, relève Bruno Gérentes, un métier qui demande nécessairement une vision globale ! » Pour le directeur général des services de la ville de Blois, la commande publique ne se limite plus seulement aux marchés : « C’est pour cela qu’on peut sans doute privilégier un profil juridique, explique-t-il, mais à la condition que le responsable de la commande publique sache contribuer à la bonne définition des besoins ».

Risque zéro, mais…

Bernadette Guérin et Étienne Desmet« Une expérience dans le secteur privé est un plus, mais elle n’est pas indispensable ». Avant de prendre son poste à Blois, en novembre dernier, Bruno Gérentes était directeur de l’évaluation, de la performance et de la prospective à Saint-Étienne. Pour lui, c’est avant tout une question de méthode : « Un responsable de la commande publique doit se comporter comme un véritable prestataire de service, il est tenu à une mission de conseil et doit savoir travailler en mode projets avec les directions opérationnelles ». Au conseil général des Pyrénées-Orientales, Bernadette Guérin en convient bien volontiers : « La prise de risque est trop importante pour que l’on puisse confier une direction à un candidat qui n’a pas encore exercé dans la fonction publique, mais les candidats qui sont également passés dans le privé offrent un plus. Ils offrent un regard différent, ils ont souvent travaillé sur des méthodes et des procédures qui peuvent être intéressantes ». Comme pour beaucoup de fonctions support, une expérience dans le secteur privé représente effectivement une réelle plus-value : « Ajouter une touche de privé dans les équipes amenées à travailler en mode projet doit être compris comme un enrichissement mutuel, estime Étienne Desmet, d’autant que les services opérationnels attendent de la commande publique qu’elle joue un rôle de conseil, en particulier sur les marchés ou les procédures complexes. De plus en plus, nous avons besoin d’une vision pluridisciplinaire et de collaborateurs maîtrisant parfaitement les mécanismes financiers du secteur privé ».

La question délicate des salaires

Reste la question de la rémunération, assez centrale confesse Étienne Desmet s’agissant des cadres qui arrivent du secteur privé : « En termes de variables d’ajustement, nous n’avons pas la même latitude que dans le secteur privé. Nous pouvons toutefois ajuster les régimes indemnitaires et positionner correctement les postes. À Versailles, nous avons élaboré un système de “pesage” des postes dans lequel le montant des budgets gérés entre en considération ». Pour les cadres B ou les cadres A au bas de l’échelle, Étienne Desmet admet que « la question est ouverte et elle en pose d’autres ». D’autant que dans les collectivités où les primes existent, les agents vivent très mal leur disparition lorsque les résultats ne sont plus au rendez-vous… « L'attractivité des salaires est une question particulièrement ardue et délicate, reconnaît Bernadette Guérin, mais elle se pose également dans d’autres métiers. Au département, les régimes indemnitaires ont été principalement arrêtés par grade et non par fonction. » Bruno Gérentes voit une manière toute simple de régler la question : « En calibrant les postes en fonction des besoins, explique-t-il, on répond déjà à la demande ». Pour le directeur général des services de la ville de Blois, il ne faut pas tomber dans le tropisme du privé : « Je ne pense pas que ce soit un sujet central, souligne-t-il, et si les profils de postes sont bien définis dès le départ, la question ne doit plus se poser par la suite ».

(1) Lire notre précédent article :

Recrutement : quel est le profil idéal de l’acheteur public ?