L’agglo de Compiègne partage son service marchés à la carte

  • 01/07/2010
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De plus en plus de villes décident de fusionner leur service marchés avec celui de l’EPCI. L’agglomération de la région de Compiègne (ARC) a choisi la mutualisation « à la carte ». Chaque commune adhérente est libre de recourir aux professionnels de la commande publique pour l’ensemble ou une partie d’une procédure. Un système souple qui a le mérite de rassurer les élus locaux souvent jaloux de leur indépendance.

A Compiègne, la coopération intercommunale ne date pas d’hier. Le premier établissement – un SIVOM – est né il y a maintenant quarante ans. Transformé en communauté de communes trente ans plus tard, l’EPCI est devenu une communauté d’agglomération en 2005 : l’agglomération de la région de Compiègne (ARC) soit 70 000 habitants au total. Outre les compétences traditionnelles (développement économique, aménagement urbain, transports en commun, déchets, eau), l’ARC propose à ses 15 communes adhérentes de partager l’expertise des services communautaires dans trois domaines : le droit des sols, l’assistance technique voirie et réseaux et les…marchés publics. En 2005, une série de conventions permet aux collectivités de faire appel au service « partagé » des marchés de l’agglo, lequel a fusionné avec celui de la ville de Compiègne. Une aubaine pour les petites communes (9 ont moins de 2000 habitants) sans personnel expérimenté dans le domaine de la commande publique. Jusque là rien d’original puisque d’autres collectivités ont suivi le même chemin. En fait l’ARC se distingue parce que cette mutualisation se fait « à la carte ». Il n’y a pas de menu imposé. « C’est la différence avec la mutualisation classique que l’on connaît. Chaque commune nous sollicite si elle a en besoin, le cas échéant de façon partielle, par exemple uniquement pour l’analyse des offres et sa mise en forme. Il n’y a pas d’obligation », détaille Jean-Marc Cordier, responsable du service « partagé » des marchés (5 personnes). Du coup, la palette d’intervention est large. Qu’il s’agisse du volume financier, de quelques dizaines de milliers d’euros à plusieurs millions. Ou de la nature du contrat (marché, DSP) et de son objet, même si les travaux (construction de locaux, réseaux et voirie) se taillent la part du lion. Le service « partagé » a ainsi géré le projet halle des sports de Venette, « le marché du mandat » de cette mairie (2600 habitants), aidé Saint-Jean-aux-Bois (384 habitants) à mener à bien les marchés de transformation de l’ancienne poste en logements, et préparé les appels d’offres de la rénovation du groupe scolaire de Jonquières (527 habitants).

640 euros la procédure

Au départ, le système n’a pas reçu un accueil délirant. En 2005, sur 60 procédures (hors agglo), 58 ont été initiées au profit de la seule ville de Compiègne. Ici comme ailleurs, les élus ont sans doute eu peur que la ville-centre phagocyte leurs achats. « Un maire a fait appel à nous. Et comme il a été satisfait de notre travail, le bouche à oreille a fonctionné. ». En 2006, le nombre de procédures passées au bénéfice des « petits » est passé à 6 (sur 53), puis à 15 en 2007 (sur 59), 10 en 2008 (sur 50) et 12 en 2009. « Et on enregistre une nette montée en puissance en 2010 », ajoute Jean-Marc Cordier. Il faut dire que la facture - 640 euros par procédure - est raisonnable. Surtout si on le compare au prix d’un prestataire externe. En pratique, comment cela se passe-t-il ? Pour chaque commune, la (ou les) personne(s) habilitée(s) par la convention fait une demande par écrit. Une première réunion se charge de défricher la définition du besoin. « C’est le maire, ou son adjoint, parfois accompagné d’un technicien ou de son maître d’œuvre s’il en a un, qui présentent le projet. Nous les interrogeons sur les aspects administratifs et techniques, comme la durée du marché. Venette nous a par exemple confié le pilotage de son marché de restauration collectivité. Nous avons évidemment posé la question du bio. Comme la ville tenait à rester dans le cadre budgétaire qu’elle s’était fixée, nous avons préconisé de mettre le bio en option. » L’équipe de Jean-Marc Cordier peut prendre en charge la procédure, de la rédaction des pièces jusqu’à la notification, en passant par la publicité, l’ouverture des plis et le dépouillement des offres. Y compris la négociation quand il s’agit de MAPA. « J’assiste les élus mais je n’interviens pas directement. Je donne des conseils en amont pour mener la négociation au mieux », précise Jean-Marc Cordier. A la commune de faire son choix.

Pas d’ingérence de l’ARC

Pour le responsable du service « partagé », l’indépendance vis-à-vis de l’agglomération est l’une des clefs du succès. « Nous sommes mis à disposition et nous travaillons sous les ordres du maire : pendant le temps de la procédure, on fait partie de son personnel. Nous lui transmettons les pièces que nous rédigeons. Il peut les modifier avant de les valider. Il n’y a pas d’ingérence ni d’interférence avec l’ARC. Je n’ai pas de compte à rendre à l’agglomération pour ces marchés et j’ai un devoir de confidentialité. Dans le cas contraire, le système ne fonctionnerait pas. » Et en cas de désaccord profond ?  « Comme ma responsabilité peut être engagée, je dispose d’un droit de retrait », répond Jean-Marc Cordier. Mais le service partagé ne s’arrête pas. Il donne volontiers (et gratuitement) conseils et recommandations en amont de façon informelle, et donne volontiers un coup de main aux communes lors d’un litige avec une entreprise pour trouver une solution. Une façon comme une autre d’éviter de se retrouver au tribunal administratif. Naturellement, il propose aux adhérents des groupements de commande, histoire de bénéficier des effets prix de la massification. Une nouvelle fois, l’ARC a choisi une ligne très souple. « Pour les fournitures de bureau, tout le monde a adhéré, mais nous laissons la faculté aux communes de ne pas participer à tous les lots et la liberté de ne pas donner suite », poursuit-il. Une position pragmatique qui tient compte des réalités de terrain.  « La massification peut faire des dégâts », résume Jean-Marc Cordier. Chacun l’aura compris, les élus souhaitent pouvoir continuer à maintenir l’emploi sur place et faire travailler des entreprises implantées localement plutôt que d’être obligés de faire appel, dans le cadre d’un groupement, à une société nationale ou internationale.

Pour contacter le service partagé : jean-marc.cordier@agglo-compiegne.fr

Jean-Marc Binot © achatpublic.info