Depuis 2008, le CHU de Bordeaux a inclus un critère de « performance environnementale » dans les consultations de ses appels d’offres ouverts de médicaments, en utilisant notamment l’article 53 du code des marchés publics qui permet d’agir sur la sélection des offres et les critères d’attribution. Trois ans plus tard, l’établissement hospitalier dresse un bilan plutôt encourageant des actions qui ont été entreprises et s’oriente vers de plus fortes exigences pour ces prochains marchés, avec l’idée d’intégrer un tout nouveau critère de performance environnementale portant sur la présentation des médicaments et de prendre en compte le coût global des produits. C’est qu’a expliqué Françoise Petiteau-Moreau, pharmacienne à l’unité d’achats de médicaments du CHU, venue présenter les résultats de ce retour d’expérience lors du séminaire sur les achats hospitaliers organisé le 28 juin dernier par l’université Paris-Descartes. « Le critère de performance environnementale utilisé depuis trois ans est un critère indépendant qui a été pondéré à 5% dans nos marchés, indique-t-elle pour commencer. Il est évalué grâce à un questionnaire mis en annexe du règlement particulier de consultation que les fournisseurs doivent remplir. Ce questionnaire déclaratif se compose de quatre items simples (cf tableau ci-dessous). »

limination des déchets : des avancées

Selon la pharmacienne, 40% des industriels y ont répondu, mais le taux de réponse est variable en fonction du type d’entreprises : « 80% de ceux qui ont répondu sont des grands groupes alors que les génériqueurs et les petites entreprises ne sont que 10% à l’avoir rempli, précise-t-elle. Beaucoup sont certifiés iso 14001 sur le management environnemental et disposent d’une charte environnementale et d’une personne dédiée à cette problématique et des matériaux de conditionnement vert. Depuis trois ans, ajoute-t-elle, nous constatons une nette évolution des pratiques des industriels concernant les modalités d’élimination des déchets : ils utilisent moins de plastiques polluants, moins de PVC et plus de verre, d’aluminium recyclables ou encore de proches sans PVC non polluantes », se réjouit la spécialiste.

Un nouveau critère baptisé « présentation »

Devant ce constat incitatif, le CHU a décidé d’accentuer ses efforts en matière de développement durable sur la présentation des médicaments et leurs matériaux d’emballage et d’augmenter la pondération du critère environnemental aux environs de 10% : « L’impact est faible avec une pondération à 5%, il faudra sans doute l’augmenter pour qu’il soit discriminant, mentionne Françoise Petiteau-Moreau. Nous allons aussi travailler sur la nature des matériaux de conditionnement des médicaments : est-il polluant ou non ? recyclable ou non ? Sur leur présentation également, car moins il y a d’emballage, moins il y a de déchets, et sur leurs modalités d’élimination », précise-t-elle. Ces éléments rentreront en compte dans un critère composite baptisé « Présentation » qui intégrera la performance environnementale des produits proposés : « Nous souhaitons évaluer l’impact de la présentation d’un médicament de sa production jusqu’au retraitement du déchet. Il va donc falloir que l’on puisse évaluer les surcoûts liés au type de conditionnement choisi ».

Vers une prise en compte du coût global

Cette notion n’est pas facile à manipuler, comme l’explique la pharmacienne : « Les modalités d’élimination varient selon les organisations : ainsi le verre est recyclable, mais il n’est pas toujours recyclé, il entraîne un surcoût d’élimination, en raison de son poids, alors que les poches vertes ne sont pas recyclables, mais ont un faible poids et son éliminées en DASRI [ndlr déchets d’activités de soin à risques infectieux] et sans pollution environnementale… La prise en compte la notion de coût global du produit dans la note technique jusqu’au coût d’élimination et de retraitement du déchet fait partie de nos perspectives de 2011 », annonce-t-elle. Le CHU de Bordeaux compte se rôder sur un appel d ‘offres pour lequel une méthode de calcul sera définie et validée « afin qu’elle soit opposable en cas de contentieux », commente la pharmacienne. L’établissement réfléchit sérieusement à regrouper les commandes autour d’une seule et même plateforme afin de réduire les emballages et diminuer les émissions de CO2 : « Le CHU possède trois points de livraison différents pour les médicaments. On souhaiterait n’en avoir plus qu’un, mais ce n’est pas encore tranché. On pense également à mettre en place des échanges de données informatisées pour les commandes, ainsi que des indicateurs de suivi, et faire du sourcing pour trouver de nouveaux fournisseurs qui répondraient à nos critères », conclut la pharmacienne.