Article 10 : le CE valide le recours au marché global

  • 02/11/2011
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Avec une baisse de prix de 66%, le recours au marché global se révèle bien moins coûteux que l’allotissement. Les justifications apportées par le département des Bouches-du-Rhône ont emporté la conviction du Conseil d’Etat qui considère que par son choix le pouvoir adjudicateur n’a pas méconnu l’article 10 du CMP.

Le département des Bouches-du-Rhône n’a pas manqué à ses obligations et publicité et de mise en concurrence en recourant au marché global pour la fourniture et la pose de signalisation verticale directionnelle sur les routes du département. Le Conseil d’Etat a suivi la solution proposée par son rapporteur public, Nicolas Boulouis (1). L’aspérité procédurale, soulevée lors de l’audience, a fait mouche. La haute juridiction relève que le juge du référé marseillais a commis une erreur de droit. Il a estimé que la société requérante avait été lésée par le non allotissement de la procédure tout en relevant que son offre était irrégulière, faute d’avoir été signée par une personne habilitée. L’analyse de l’offre par la personne publique a, pour le magistrat phocéen, validé son irrégularité. Or, il résulte d’une lecture combinée des articles 53-III et 11 du code des marchés publics « qu’une offre, dont l’acte d’engagement n’est pas, avant la date limite de remise des offres, signé par une personne dûment mandatée ou habilité à engager l’entreprise candidate, est irrégulière et doit être éliminée comme telle avant même d’être examinée". L’ordonnance doit être annulée. Le Conseil d’Etat statue alors sur la demande de référé.

Le marché global justifié

En première instance, le juge a fait droit à la demande d’annulation de la société Signature au motif que « faute d’établir l’existence d’une des exceptions au principe de l’allotissement des marchés publics, la passation par le département des Bouches-du-Rhône d’un marché global a méconnu les dispositions précitées de l’article 10 du code des marchés publics ; que le choix de ne pas allotir le marché en cause, entaché d’une erreur manifeste, caractérise un manquement du département des Bouches-du-Rhône à ses obligations en matière de mise en concurrence » (2). Au Conseil d’Etat, les sages ont estimé que le département a suffisamment justifié que le recours à l'allotissement aurait pu être de nature à rendre plus coûteuse la réalisation des prestations prévues au contrat. La personne publique fait valoir que le choix du marché global résulte d’une volonté de limiter les risques d’entente locale entre candidats et de favoriser les économies d’échelles. Grâce à lui, elle a obtenu une baisse de prix de 66%, par rapport aux offres sélectionnées en 2006 dans le cadre du marché alloti, « sans qu’une telle baisse de prix puisse être entièrement imputée au renforcement structurel de la concurrence dans le secteur de la signalisation verticale à la suite de la dissolution de l’entente grevant ce secteur ». Dans sa décision, le Conseil d’Etat ne dit pas expressément qu’il opère un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation. Mais peut-il en être autrement, d’autant qu’en matière de la définition du nombre et de la consistance des lots, la haute juridiction a estimé que le manquement commis ne peut résulter que d’une erreur manifeste d’appréciation. L’autre argument soulevé par l’entreprise est que le département n’a pas vérifié les capacités financières des candidats, et en particulier de l’entreprise attributaire placée en redressement judiciaire. Suivant les conclusions du rapporteur public, les magistrats ont, en s’appuyant sur l’article 45 du CMP et sur l’article 1er de l’arrêté du 28 août 2006, estimé que le pouvoir adjudicateur n’a pas méconnu ses obligations en exigeant des candidats la présentation de leur chiffre d’affaires global réalisé sur les trois derniers exercices. Et ce même, si l’entreprise attributaire a été placée en redressement judiciaire peu après la sélection de son offre. Après avoir rejeté la demande de la société Signature, le Conseil d’Etat enfonce le clou et la condamne à verser 4.500 euros au département.

CE, 27 octobre 2011, Département des Bouches-du-Rhône, 350935

(1) Marché global ou allotissement : le juge contrôle l’erreur manifeste d’appréciation

(2) TA Marseille, 30 juin 2011, société Signature, 1104063