Les élus de Ramatuelle condamnés pour délit de favoritisme attendent leur jugement en appel

  • 02/08/2006

Condamnés injustement pour délit de favoritisme dans une affaire concernant l’attribution d’un lot de plage à Pampelonne qui n’avait pas abouti, les élus municipaux de Ramatuelle attendent maintenant les conclusions du jugement en appel.

Tribunal administratif, tribunal correctionnel, cour administrative d’appel et conseil d’Etat : c’est une bataille acharnée que se livrent depuis cinq ans la ville de Ramatuelle et l’exploitant du célèbre bar-restaurant « la voile rouge » sur la plage de Pampelonne qui a vu passer sur ses chaises longues d’innombrables vedettes du cinéma et du show biz depuis sa création et concouru à rendre la petite commune de Saint-Trop’ célèbre dans le monde entier. Leur affrontement a déjà engendré une bonne dizaine d’arrêts depuis le début des hostilités. De ces différents bras de fer engagés, il en est un qui a laissé des traces du côté des élus locaux : celui du tribunal correctionnel. Dans l’affaire en question, Paul Tomaselli, qui dirige « la voile rouge », a attaqué l’ensemble des membres du conseil municipal en mandat entre 1995 et 2001 pour n’avoir attribué à personne un lot de la plage de Pampelonne par délibération des 24 mars et 30 mai 2000. La plainte a abouti à la condamnation pour délit de favoritisme de chacun des membres du conseil municipal en tant que personne physique le 13 janvier 2005. Le tribunal correctionnel de Draguignan les a contraints à 1 000 € d’amende et 500 € de dommages et intérêts à verser à Paul Tomaselli. On reproche aux élus de ne pas avoir respecté les principes de transparence lors l’attribution des lots de plage avant 1993, date de sortie de la loi Sapin sur les délégations de service public. Les édiles auraient-ils dû être dotés à l’époque d’une boule de cristal pour voir l’avenir ?! Devant une telle décision, on est en droit de se le demander…

Une sanction rare et sévère

Pour Marc Richer, la décision du tribunal correctionnel de Draguignan est tout à fait regrettable « car les édiles n’avaient pas l’intention volontaire de contourner la loi étant donné qu’elle n’existait pas à l’époque. C’est une sanction rare et très dure que de considérer qu’une décision collégiale peut constituer un délit collectif. Or, il n’y a pas eu, en l’espèce de décision collective de fraude », commente l’avocat. Comment le tribunal correctionnel a-t-il pu infliger une telle sanction aux élus ? « La qualification de l’élément intentionnel est très souple en délit de favoritisme, puisqu’il est constitué par le seul accomplissement, en connaissance de cause, d’un acte contraire aux règles de passation d’un des contrats concernés par le délit (1). Il n’est donc pas nécessaire de démontrer, pour que le délit soit constitué, l’intention de favoriser le bénéficiaire de l’avantage injustifié », explique-t-il. La décision du tribunal correctionnel a eu pour conséquence néfaste que les élus de Ramatuelle ne souhaitent plus siéger en commission d’appels d’offres ou en commission pour l’attribution de DSP. « C’est très dommageable car les élus, bien avant la jurisprudence « Chez Joseph », avaient entamé un gros effort pour assainir l’attribution des lots de plage. Ils étaient en avance par rapport à d’autres collectivités et ont agi, à l’époque des faits reprochés, en toute bonne foi », estime Marc Richer. Le jugement est en appel et son dénouement prochain. Gérer les plages, ce n’est décidemment pas un long fleuve tranquille.

(1) Cour de Cassation, chambre criminelle, 14 janvier 2004, 03-83396