Les restaurateurs de plage jugent le décret déconnecté de la demande touristique

  • 02/08/2006

Les températures estivales ont beau flirter au-dessus des 30°C depuis plusieurs semaines, le décret sur les concessions de plage a franchement refroidi la Fédération nationale des restaurateurs des plages. L’association estime que le texte ne prend pas en compte la demande touristique actuelle et la réalité économique de la profession. Elle conteste la restriction de l’activité des établissements fixée à 6 mois, la diminution de la surface des plages concédées et l’obligation de démonter les équipements chaque année.

La Fédération nationale des restaurateurs des plages (FNPR) n’est pas contente et entend le faire savoir. Elle prépare, pour le début du mois d’août, une vaste opération médiatique destinée à sensibiliser le grand public aux difficultés que la profession risque fort de rencontrer avec les nouvelles dispositions du décret sur les concessions de plage. Trois points du texte posent problème à la Fédération : le premier concerne la diminution de la surface des plages concédées qui est réduite de 30 à 20%. Pour Jean-Claude Moreu, le président de la FNPR et exploitant du restaurant « les deux jumeaux » sur la plage de Pampelonne : « cette contrainte n’aura probablement pas beaucoup d’effets pour les restaurateurs installés sur le littoral atlantique, mais elle en aura pour ceux qui travaillent sur les côtes méditerranéennes de Corse, du Var, des Alpes-Maritimes et des Bouches-du-Rhône où les plages sont plus petites et la pression touristique la plus forte », avance-t-il.

Des dispositions déconnectées de la réalité

Deuxième point d’achoppement : la restriction de l’activité des établissements, un sujet qui n’avait pas été abordé dans les textes législatifs et réglementaires précédant la publication du décret. Désormais, cette durée est limitée à 6 mois, montage et démontage des structures compris, sauf dans le cas des stations classées où les installations peuvent bénéficier d’une période d’activité étendue à 8 mois. « Et encore, précise Jean-Claude Moreu, pour faire partie de cette catégorie, il faut pouvoir justifier de la présence d’un office de tourisme quatre étoiles implanté depuis plus de deux ans sur le site et de l’ouverture en moyenne de plus de 200 chambres d’hôtels classés par jour entre le 1er décembre et le 31 mars. Cette disposition est également très contraignante et déconnectée de la réalité. La première demande des touristes étrangers en hiver, c’est de pouvoir justement déjeuner ou dîner en bord de mer. Il y a une activité touristique en basse saison qui légitime pleinement l’ouverture d’établissements toute l’année », argue le président de la FNPR.

La démontabilité annuelle : un risque de dégradations accrues pour la nature

Enfin, dernière disposition litigieuse : la démontabilité annuelle des établissements. Les plages concédées devront, en effet, être libérées de tout équipement ou installation en dehors de la période des 6 mois d’ouverture. « Nous ne remettons pas en cause le fait que les restaurants doivent être construits avec des matériaux légers, facilement démontables, et respectueux de l’environnement. Et nous nous accordons à dire qu’il y a eu dans certains endroits des abus de la part de plagistes en raison de l’absence de législation et d’une demande touristique constante. Mais exiger de démonter et remonter chaque année les structures, cela nous paraît une aberration financière et écologique. Faire autant de chantiers chaque année, c’est plus dégradant pour la nature que de laisser l’établissement en place pendant le délai couvrant la concession et de le détruire en cas de non renouvellement du contrat », estime Jean-Claude Moreu.

Lettre ouverte à Dominique de Villepin

L’obligation de remise en concurrence semble, en revanche, bien acceptée par la Fédération : « c’est un risque pour les exploitants, mais il fallait une remise en ordre des occupations du domaine public. Aux plagistes de respecter le cahier des charges», répond le restaurateur. Pour son association, la lutte contre le décret se place surtout sur le terrain économique : « le décret n’est pas du tout en adéquation avec la demande touristique actuelle et la réalité économique de cette activité. La profession génère 12.000 emplois directs et autant d'emplois indirects. Pour ma part, j’emploie toute l’année 10 salariés sur une centaine d’emplois directs à Ramatuelle. Obliger les restaurateurs qui travaillent durant la haute et basse saison à fermer 6 mois de l’année va poser, cela va poser de gros problèmes et aura des répercussions sur l’emploi local », prévient le président de la FNPR. Outre son action médiatique à venir, l’association a publié une lettre ouverte à Dominique de Villepin, suite à sa déclaration le 16 juin dernier au Mont Saint-Michel, dans laquelle il a annoncé que le décret avait permis de « préserver le libre accès du public à l’essentiel des plages et d’assurer leur maintien en l’état naturel en imposant aux constructions d’être démontables » et que 329 établissements seraient détruits à l’expiration de leur autorisation d’occupation du domaine public. La Fédération a également envoyé une lettre à Dominique Perben et Jean-Louis Borloo leur demandant d’être reçus pour aborder leurs difficultés.