Publicité des DSP : le Conseil d’Etat lève un gros poisson

  • 03/04/2009
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La Haute juridiction, par un arrêt du 1er avril, a validé l’insertion d’une publicité dans des publications à diffusion nationale pour la passation de la DSP de transports de la communauté urbaine de Bordeaux. L’annonce n’était pas susceptible d’échapper à la vigilance des opérateurs situés dans d’autres Etats membres de l’Union européenne.

 La passation d’une délégation de service public de transports urbains de voyageurs de 750 millions d’euros n’oblige pas à insérer une publicité dans un support bénéficiant d’une diffusion européenne. « Lorsque la délégation de service public en cause est, compte tenu de ses caractéristiques, susceptible d'intéresser des opérateurs implantés sur le territoire d'autres Etats membres de l'Union européenne, une procédure de publicité adéquate peut être assurée par une insertion dans un support de référence pour les annonces concernant les procédures de délégation de service public lancées en France dans le domaine concerné. » (1) Conformément aux prescriptions du rapporteur public, Bertrand Dacosta, le Conseil d’Etat a ainsi justifié son aval donné à la procédure de passation de la DSP de transports couvrant les années 2008 à 2013 de la communauté urbaine de Bordeaux (CUB) et pour laquelle elle n’avait fait paraître des publicités que dans des supports nationaux. La Haute juridiction pose une seule condition : pour être adéquate, une telle publicité doit être « insusceptible d'échapper à l'attention des opérateurs raisonnablement vigilants pouvant être intéressés par une telle délégation, y compris ceux implantés sur le territoire d'un autre Etat membre ». A l’audience du 6 mars, le rapporteur public avait rappelé qu’une entreprise qui souhaitait « présenter une candidature crédible » se devait d'effectuer « une veille permanente pour comprendre les pratiques locales de service public ». Aux entreprises, « d'être attentives aux marchés qu'elles souhaitent conquérir », avait-il conclu. En d’autres termes, tout candidat à une délégation de service public situé dans un autre Etat membre de l’Union européenne doit s’intéresser aux publications nationales françaises spécialisées qui font figure de référence dans leur domaine.

Pas d’insertion systématique dans un support à diffusion européenne

« La communauté urbaine de Bordeaux (…) n'était pas tenue de procéder systématiquement à une insertion dans un support bénéficiant d'une diffusion européenne », ont estimé les sages du Palais-Royal. Ce n’était pas l’avis du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux qui avait annulé la procédure le 10 décembre dernier sur ce motif. Son erreur a été, selon le Conseil d’Etat, de ne pas rechercher si, en dépit de leur diffusion limitée sur le plan international, les publications spécialisées retenues ne constituaient pas des supports de référence pour les annonces concernant les procédures de DSP lancées en France dans le domaine du transport public urbain de voyageurs, et si elles pouvaient ou non échapper aux opérateurs éventuellement intéressés par une telle délégation. Pour le Palais-Royal, la collectivité a en effet bien suivi les dispositions du CGCT (art. L1411-1 & R1411-1) relatives aux publicités des DSP, même lorsqu’elles sont interprétées à la lumière des règles européennes sur la non discrimination au regard de la nationalité. La CUB avait publié un avis d'appel public à la concurrence dans les « Echos judiciaires girondins », un journal local d'annonces légales et dans la revue bimensuelle « Ville & Transports » (une des revues de référence dans le domaine du transport public de voyageurs publiant grand nombre d’annonces relatives aux DSP passées dans ce secteur). Elle a aussi fait paraître une publicité dans le « Moniteur du Bâtiment & des Travaux publics » et sur le site Internet « Marchés on line ». Celui-ci est présenté dans l’arrêt comme un site « largement fréquenté, avec plus de 2 millions de pages vues par mois » avec « environ 14500 entreprises inscrites » et comme étant « une source d'information reconnue pour les avis concernant les marchés de travaux publics, mais aussi les marchés de services et les délégations de service public passés sur le territoire français ». Pour la Haute juridiction, la CUB a ainsi « mis en œuvre une procédure de publicité adéquate » sans méconnaître ses obligations de publicité et de mise en concurrence ni porté atteinte à l'égalité de traitement entre les opérateurs. Elle n’a pas non plus perdu de temps puisque son président, Vincent Feltesse, a signé, le jour même de l’arrêt du Conseil d’Etat, le contrat avec la société Keolis. Dans son communiqué, la CUB annonçait cependant que la société Veolia avait déposé, également le 1er avril, un nouveau recours en référé précontractuel devant le tribunal administratif de Bordeaux…

Bénédicte Rallu

(1) Décision du Conseil d’Etat du 1er avril 2009, Communauté urbaine de Bordeaux, requêtes n° 323585 & 323593 CE 1er avril 2009 CUB (342.31 kB)