Choisir une société avant la CAO, qui doit formaliser ce choix par un vote, constitue un délit de favoritisme

  • 14/11/2007
partager :

En février 1991, la commission administrative du service départemental d’incendie et de secours du département de l’Indre (CASDIS), présidée par Daniel X..., président du conseil général dudit département, a décidé de lancer une procédure d’appel d’offres afin d’équiper cet établissement public d’un centre de traitement des alertes (CTA). Le 1er août 1992, avant même que la commission d’appel d’offres n’ait choisi l’attributaire du marché, Daniel X... a signé l’acte d’engagement de la société TIC, dont l’offre était pourtant jugée par le groupe de travail, désigné par la commission d’appel d’offres, «trop hasardeuse et comportant trop de risques” avant, toutefois, de le retirer sur injonction du préfet de l’Indre. Le 20 octobre 1992, la CAO, réunie sous la présidence de Georges E..., vice- président du conseil général de l’Indre et titulaire d’une délégation de signature de Daniel X... pour exercer les fonctions de président de la CADSIS, a désigné à nouveau comme attributaire du marché la société TIC, Gérard E... signant l’acte d’engagement de cette société le 5 novembre 1992 et l’arrêté annulant le précédent marché le 13 novembre 1992. Suite à une dénonciation du président de l’Union départementale des sapeurs pompiers, le procureur de la République a ordonné une enquête préliminaire et requis l’ouverture d’une information judiciaire contre personne non dénommée des chefs de faux et usage, favoritisme et recel. A l’issue de cette information, Daniel X..., alors sénateur, et Gérard E... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel du chef de tentative de favoritisme. Condamné par la cour d’appel de Bourges pour atteinte à la liberté d’accès et à l’égalité des candidats dans les marchés publics, Daniel X s’est pourvu en cassation contre la décision. Dans un arrêt rendu le 19 septembre 2007, la chambre criminelle de la cour de cassation a jugé que « pour déclarer Daniel X... coupable de favoritisme, l’arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que le prévenu a signé l’acte d’engagement du 1er août 1992 qui confiait le marché du centre de traitement des alertes du SDIS à la société TIC, avec, comme sous-traitant, la société TGA, alors que la commission d’appel d’offres ne s’était pas encore réunie pour choisir l’entreprise attributaire ; que les juges ajoutent, qu’à la suite de l’intervention du préfet de l’Indre lui ayant enjoint de retirer ce marché, le prévenu, qui suivait personnellement le déroulement de la procédure d’attribution de ce dernier et ne pouvait plus s’y impliquer directement, a demandé à Gérard E..., titulaire d’une délégation de signature en vertu d’un arrêté du 17 juin 1985, de signer l’acte d’engagement du 5 novembre 1992 ; qu’ils retiennent également que le choix des sociétés TIC et TGA avait été fait avant la réunion de la commission d’appel d’offres, qui devait formaliser ce dernier par un vote ; que les juges en concluent que les sociétés TIC et TGA ont été déclarées attributaires par préférence aux autres candidats et en dehors de toute considération technique ou technologique, pour favoriser des entreprises locales dont l’un des dirigeants entretenait des relations personnelles avec Gérard E... »

Cass. Crim., 19 septembre 2007, n°06-85003