Comme je suis insomniaque, je me suis abonné, sur le câble, à la chaîne TVHApublic, qui passe, vers trois heures du matin, une émission soporifique intitulée « L'injuste prix », animée par un présentateur primesautier, sans doute victime d'une trépanation précoce. Le tout dans un décor criard de carton-pâte d'un goût funeste (c'est en tout cas le jugement de mon voisin Hilarion). En général, deux candidats, un responsable des marchés et un soumissionnaire, s'affrontent pour tenter de déterminer la valeur d'un bien ou d'un service, en tapant, comme des forcenés, sur un bouton champignon, couleur rouge pétard. La première question s'affiche sur un écran géant : combien doit-on débourser en moyenne pour engager un référé précontractuel ? « Pas un sou ! Cela ne sert plus à rien», ricane le chef d'entreprise, en brandissant une récente décision de TA (lire notre article). Mauvaise réponse, annonce une voix de rogomme. Deuxième colle : quel est le montant de la baisse du prix de l'eau à Paris après le retour en gestion publique. « 8% ? », hasarde l'acheteur. Sa bonne réponse déclenche illico un tonnerre d'applaudissements factices préenregistrés (lire notre article). Troisième question : comment distinguer une facture espagnole d'une facture française s'agissant d'un marché de revêtement d'une ligne de tramway ? « Elle est trois moins chère et c'est une honte !», éructe le candidat fournisseur (lire notre article). Quatrième devinette : qui a allégé de 22% sa facture de gaz en sortant du tarif de vente réglementé ? Le lourd silence est interrompu par l'animateur : « Je vous donne un indice, et pas un index, ajoute-t-il en gloussant, il s'agit d'un pouvoir adjudicateur situé dans la localité du primat des Gaules ». « Les hospices civils de Lyon », réagit aussitôt l'acheteur en massacrant son buzzer (lire notre article). « Attention, maintenant la question bonus, celle qui peut vous départager, insiste le speaker. Qui a déclaré : le prix reste une alchimie très complexe ? ». Je coupe la télé car je connais la réponse : c'est Catherine Bergeal, qui nous a fait le privilège de commenter, dans nos colonnes, la sortie du guide des prix de la DAJ (lire notre invité du jeudi). Bon allez, je vous laisse, la priorité, c'est de décortiquer la décision du Conseil d'Etat au sujet du lien entre le critère social et l'objet du marché (lire notre article). A la semaine prochaine, a priori.

Jean-Marc Binot