Trophées de la commande publique 2020 : un prix spécial pour l’AP-HM

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Créer cette année, pour l'édition 2020 des Trophées de la commande publique (organisés par achatpublic.com et le ministère de la Transition écologique et solidaire) un prix spécial pour les acheteurs qui se sont distingués durant la crise sanitaire tombait sous le sens. Être capable de jongler avec les difficultés d’approvisionnement, les ruptures de stock, l’hallucinante augmentation des prix, les escrocs qui proposaient la solution miracle, les fournisseurs chinois qui réclamaient 100% à la commande et les américains qui payaient le double en cash au pied des avions affrétés pour la France alors que le Covid y faisait des ravages... cela méritait bien un coup de chapeau.

À l’évidence, le prix spécial des Trophées de la commande publique 2020 devait être décerné à l’un des innombrables hôpitaux confrontés aux conséquences désastreuses de la crise sanitaire. Les acheteurs hospitaliers n’avaient pas le droit à l’erreur, tant vis-à-vis des patients que du personnel dont les hôpitaux ont un besoin vital. Même si les acheteurs territoriaux et ceux de l’État ont été eux-aussi sous pression, elle n’était en rien comparable à celle que subissaient les hospitaliers, car la moindre erreur pouvait se traduire par une augmentation des contaminations au sein de l’hôpital et, in fine, par une augmentation des décès des patients Covid.

Maintenant que ce sombre tableau est dressé, nous pouvons vous livrer les raisons pour lesquelles le jury 2020 a souhaité récompenser l’engagement de la direction des achats des Hôpitaux Universitaires de Marseille (AP-HM) qui a fait face aux difficultés et aux ruptures d’approvisionnement. Afin que les stocks ne fondent pas à vue d’œil, les acheteurs de l’AP-HM ont initié des achats, directement à l’international, avec leurs partenaires institutionnels locaux et ont fonctionné quotidiennement en mode « cellule de crise approvisionnement » avec une gestion centralisée de la demande et de la distribution. Tout cela en facilitant une prise de décision rapide et en cherchant à sécuriser leurs achats par l’adaptation des processus de validation afin de réagir le plus souvent en temps réel.


Une équipe en ordre de marche


Les moyens mis en œuvre à Marseille ont permis d’assurer une bien plus grande fluidité dans les échanges et les procédures, ainsi que dans les étapes de contrôle et de validation.

La stratégie montée par les Hôpitaux universitaires de Marseille et ses résultats sont le fruit d’un travail collectif. Sous l’impulsion de Jeanne de Poulpiquet, directrice des achats, de l’approvisionnement et des services logistiques, assistée de Caroline Bouchareu, directrice adjointe dédiée à la logistique, et de Franck Guyot, responsable des achats, du pilotage et de la performance, tous s’y sont mis : Fabienne Faure, Caroline Donsimoni et Aurélie Grégoire, les acheteuses du domaine hôtelier, ainsi que les logisticiens emmenés par Yves Bohssain, responsable de la plateforme logistique et Christophe Marie, chargé de la politique hôtelière.

Alors que tous les acheteurs de la planète couraient après les équipements de protection individuelle et les articles d’hygiène à usage unique, ceux du domaine hôtelier de l’AP-HM ont permis de maintenir, malgré tout, la continuité des services de soins en première ligne face au Covid. « Diverses méthodes ont été très rapidement mises en place devant l’état d’urgence sanitaire, explique Jeanne de Poulpiquet, tout d’abord la mise en place d’une cellule de crise quotidienne “approvisionnements”, puis une organisation des achats en mode “salle de marchés”, la sécurisation des achats en adaptant les processus de validation, et enfin une gestion centralisée de la demande et de la distribution, s’appuyant sur une étroite collaboration entre acheteurs, approvisionneurs et soignants ».
Les moyens mis en œuvre à Marseille ont donc permis d’assurer une bien plus grande fluidité dans les échanges et les procédures, ainsi que dans les étapes de contrôle et de validation.
 

La stratégie de l’AP-HM passée au scanner


Dès le mois d’avril, les acheteurs de la salle de marchés se tournaient également vers les achats locaux et les initiatives innovantes, faisant notamment appel à des réseaux de fabrication locaux et éphémères

Premier axe de la stratégie des Hôpitaux Universitaires de Marseille, la cellule de crise approvisionnements. Instaurée dès le début mars, et toujours opérationnelle, elle analyse quotidiennement les besoins exprimés par les différents services de soins, dont les réanimations, très consommatrices d’équipements de protection individuelle. Acheteurs et approvisionneurs pouvaient ainsi ajuster en temps réel les commandes aux besoins des soignants.

Deuxième axe, l’organisation des achats en mode “salle de marchés”. « Quatre acheteurs étaient en recherche permanente de gros distributeurs connus ayant du stock en France, explique une des acheteuses, parallèlement nous avons étendu notre sourcing, développé la voie des achats à l’international via des sociétés spécialisées dans l’importation, ce qui a nécessité des analyses fournisseurs afin de sécuriser les approvisionnements pour ces filières que nous ne connaissions pas. Nous avons également profité des opportunités offertes par l’ordonnance 2020-319 du 25 mars 2020 avec la validation de notre service juridique et du receveur des finances ».

Bien évidemment, comme ailleurs, les acheteurs de la salle de marchés ont dû procéder à des avances pouvant osciller de 30 à 100% à la commande vers les fournisseurs étrangers : « Elles ont notamment permis de prioriser l'affrètement de l'international vers I’APHM, parfois en 48h. Cette nouvelle pratique d'achat a nécessité une bonne coordination avec notre direction des affaires financières et le Trésor Public ».

Dès le mois d’avril, les acheteurs de la salle de marchés se tournaient également vers les achats locaux et les initiatives innovantes, faisant notamment appel à des réseaux de fabrication locaux et éphémères…
 

Sécuriser les achats et centraliser la gestion


Il fallait s’assurer de la fiabilité des entreprises, mais également de celle des produits dont nous ne pouvions le plus souvent pas recevoir d’échantillons

Compte tenu du contexte inédit, il convenait de sécuriser les achats en adaptant les processus de validation. C’est le troisième axe de la stratégie élaborée par l’AP-HM : « Il convenait que nous adaptions dans l’urgence nos processus de validation, rapporte Jeanne de Poulpiquet, en amont, du sourcing à l’analyse sur pièces de la conformité des produits, et à la réception des produits avec la mise en place de contrôles qualité et sécurité systématiques grâce à la mobilisation de nos experts ».
La méthodologie était d’autant plus complexe à mettre en œuvre pour garantir un achat sécurisé qu’ils provenaient de l’étranger : « Il fallait tout d’abord s’assurer de la fiabilité des entreprises, explique Franck Guyot, mais également de celle des produits dont nous ne pouvions le plus souvent pas recevoir d’échantillons ». La validation n’intervenait qu’après le passage de nombreux voyants au vert : « Parfois en seulement 24 heures ! ».

Dernier axe, la gestion centralisée de la demande et de la distribution autour d’un lien fort entre acheteurs, approvisionneurs et soignants : « Face au constat que la gestion de crise nécessitait une organisation plus centralisée et plus rapide, et suite aux orientations de la cellule de crise, la politique de distribution des produits sensibles a été très rapidement revue en désignant des cadres de soins, référents de crise, responsables de la distribution des produits dans les unités de soins avec suivi et régulation des demandes, explique Jeanne de Poulpiquet, aucun produit sensible n'a été distribué directement dans les services de soins par les services logistiques ».

La communication autour de la mise en place de cette régulation a permis de maintenir en permanence, malgré la forte tension, un niveau d'approvisionnement satisfaisant. Aux Hôpitaux universitaires de Marseille, cette organisation a permis le maintien de l’approvisionnement en équipements de protection individuelle sensibles malgré une hausse de la consommation qui a pu atteindre 60% au plus fort de la crise.