Documents de consultation : mieux vaut éviter les ambiguïtés

  • 05/06/2009
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Le Conseil d’Etat vient d’annuler une procédure pour la passation d’un marché de transport en raison d’« incertitudes » et de « contradictions » présentes dans les documents de consultation. En première instance, le juge des référés avait sanctionné une demande de précisions sur le prix des offres déposées.

Dans l’achat, il faut savoir ce que l’on veut. Et être précis dans ce que l’on demande. Un manque de clarté dans des documents de consultation, et c’est l’ensemble de la procédure qui peut capoter. C’est ce qui vient d’arriver au département du Var à propos d’un marché de transport d'élèves et d'étudiants handicapés passé en février 2008. Dans une décision rendue le 20 mai (1), le Conseil d’Etat a jugé que des « incertitudes, voire [des] contradictions affectant les critères de sélection des offres [avaient] constitué un manquement, par le pouvoir adjudicateur, à ses obligations de publicité et de mise en concurrence ». Cela aurait pu peut-être paraître sans conséquences, mais la chance n’était pas du côté de la collectivité varoise. Les sages du Palais-Royal ont estimé que ce manquement « était susceptible, eu égard à sa portée et au stade de la procédure auquel il se rapporte, de léser la société VORTEX », requérante contre la procédure. Ils ont donc annulé la consultation.

Le marché en question comportait 19 lots constitués par secteurs géographiques pour assurer la desserte d’établissements d’enseignement. L’AAPC mentionnait un type de véhicules pour chaque trajet. Mais le bordereau de prix faisait, lui, apparaître plusieurs types de véhicules à chaque fois. Le règlement de consultation indiquait sur ce point, selon l’arrêt du Conseil d’Etat, que « les entreprises pouvaient soit remplir l'ensemble du bordereau des prix, soit, si elles ne disposaient pas de l'ensemble des véhicules, le prix pour le seul véhicule spécifié correspondant aux prestations indiquées dans l'état prévisionnel de service ». Concernant le choix des offres, en cas d'égalité de prix sur un même lot, le pouvoir adjudicateur se réservait « la possibilité de comparer les offres des candidats sur la base d'un nouveau cadre estimatif intégrant l'ensemble des prix mentionnés dans le bordereau des prix unitaires ».

« Jamais tenu d'inviter un candidat à régulariser son offre »

La société Vortex a déposé une offre pour chacun des lots du marché, avec un prix pour le seul véhicule de référence (alors que l’entreprise disposait d’une gamme large de véhicules). La commission d’appel d’offres du département lui a demandé de préciser si le prix indiqué valait également pour d’autres véhicules (2). Les éléments de réponse apportés par le candidat ont eu « pour effet, pour quatorze des dix-sept lots concernés, d'ajouter à l'offre de nouveaux prix ». Après quoi, le département a informé la société Vortex du rejet de ses offres, au motif qu'elles n'étaient pas les plus avantageuses pour trois lots et qu'elles étaient irrégulières pour les autres. En première instance, le juge des référés avait estimé que la collectivité avait poussé le candidat à la faute et annulé la procédure car, après sa demande de précisions, elle s’était abstenue de lui demander s’il entendait les maintenir.

La haute juridiction a pris le parti inverse : « le pouvoir adjudicateur n'est jamais tenu d'inviter un candidat à régulariser son offre, quand bien même il serait allégué que l'irrégularité de l'offre résulterait d'une demande de précision formulée par le pouvoir adjudicateur », a-t-elle asséné. Le juge des référés a donc commis une erreur de droit en sanctionnant la consultation sur ce motif. Mais sur le fond, le Conseil d’Etat donne tout de même raison à la société Vortex. Les documents de la consultation devaient être interprétés comme donnant le choix au candidat entre deux options : renseigner l'ensemble du bordereau des prix portant sur l'intégralité de la gamme des véhicules de transport, ou, s’il ne disposait pas de l'ensemble des véhicules référencés, indiquer les prix des prestations mentionnées dans l'état prévisionnel des services. Même si le pouvoir adjudicateur pouvait effectivement départager les offres au regard du moins-disant et, en cas d’équivalence, au regard de « chaque prix unitaire du bordereau des prix », pour les juges, cela laissait supposer que « ce départage se ferait sur la base des prix proposés pour la gamme complète des véhicules référencés ». Morale de l’histoire, mieux vaut écrire clairement que de laisser les candidats supposer…

(1) Décision du Conseil d’Etat du 20 mai 2009, Département du Var, requête n°318871  CE 20 mai 2009 conseil général du Var (245.77 kB)

(2) Quand la CAO demande des précisions, y a-t-il danger ?