Procédure négociée : des précisions bientôt apportées

  • 15/07/2009
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A l’occasion d’un litige sur la passation d’un marché de collecte de déchets, le Conseil d’Etat devrait éclairer les conditions d’utilisation de l’article 66 du code des marchés publics.

Lors de la phase de négociation succédant à une première consultation déclarée infructueuse, le pouvoir adjudicateur doit-il systématiquement renvoyer les documents de consultation aux candidats ? L’article 66-I du CMP serait-il plus contraignant que le droit communautaire qui dispense de la production du cahier des charges lors de la phase de négociation ? Ce sont les questions soulevées lors dans un litige né de la passation d’un marché négocié lancé en 2008 par le syndicat de collecte et de traitements des déchets de la vallée de Montmorency (Val d’Oise). Lors de l’examen de l’affaire par le Conseil d’Etat le 8 juillet, le rapporteur public, Bertrand Dacosta, a esquissé une interprétation. Selon les dispositions du code, en cas de procédure négociée, une lettre de consultation est envoyée simultanément à tous les candidats sélectionnés. Elle comporte au moins les documents de la consultation, la date et l'heure limites de réception des offres, l'adresse à laquelle elles sont transmises, les références de l’AAPC publié, éventuellement la date limite pour demander des documents complémentaires et la liste des documents à fournir avec l'offre. Dans l’affaire, un premier appel d’offre avait été lancé pour un marché de collecte des déchets ménagers et assimilés. Il comprenait cinq lots. Le premier, n’ayant reçu que des offres déclarées inacceptables au sens de l’article 35 du CMP à cause d’un prix trop élevé, fut déclaré infructueux. Le syndicat a donc choisi de poursuivre en procédure négociée pour ce seul lot.

Une lettre, pas de documents

Dans sa lettre envoyée aux candidats le 1er décembre 2008, le syndicat n’a pas inséré les fameux documents de la consultation mais y a renvoyé de manière, semble-t-il, obscure. Cela suffisait à faire dire à David Gaschignard, l’avocat du groupe Pizzorno Environnement, requérant contre la procédure, que « les conditions de la consultation étaient ambiguës ». Dans la manière dont étaient présentées les choses, le candidat a eu l’impression que la négociation ne portait réellement que sur le prix. En somme les conditions de la consultation initiale auraient évolué. Dans ses conclusions, Bertrand Dacosta a écarte ce grief. « Le pouvoir adjudicateur pouvait demander à revoir le prix à la baisse. Mais il devait apprécier les nouvelles offres au regard du critère prix et du critère technique », a-t-il rappelé. La lettre utilisée pour la procédure négociée ne modifiait pas, selon lui, les conditions initiales et ne reflétait pas la passation d’une nouvelle consultation. Le pouvoir adjudicateur n’a pas non plus entamé une nouvelle négociation pour le lot n°1, comme le reprochait l’accusation. En somme, il s’agissait bien d’une seule et même consultation.

Aucune modification

Une manière de justifier la façon de procéder du syndicat. Il était soutenu devant la haute juridiction que l’article 66, en imposant la fourniture des documents de consultation, irait plus loin que l’article 40 de la directive de 2004 sur les marchés publics. Selon Bertrand Dacosta, les Etats étaient libres d’aller plus loin en droit interne et la production des documents de consultation est tout à faite « pertinente » en cas de modification des conditions initiales de la consultation. Mais dans le cas inverse, c’est-à-dire quand le pouvoir adjudicateur ne renvoie pas les documents, cela laisse supposer qu’aucune modification n’est intervenue. Aussi, les reproches du groupe Pizzorno Environnement n’avaient pas lieu d’être. C’est pourquoi, le rapporteur public a proposé au Conseil d’Etat de rejeter la requête de l’entreprise, à laquelle le juge des référés avait dans un premier temps fait droit en annulant la procédure. Mais en voulant sanctionner le lot n°1, celui-ci a annulé l’ensemble de la consultation, alors qu’elle n’aurait pu être que partielle. Or le pouvoir du juge des référés n’est pas « inconditionné », a estimé le rapporteur public. « Si le juge des référés devait annuler l’ensemble d’une procédure pour non communication des motifs du rejet d’une offre, il commettrait une erreur de droit », a-t-il imaginé. C’est pourquoi il propose que le Conseil d’Etat casse le jugement de première instance. La haute juridiction se prononcera dans quelques semaines.