Nouveau coup dur pour les référés

  • 03/10/2011
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Le requérant doit absolument notifier son référé précontractuel à la personne publique sans attendre la communication par le greffe du TA. En cas d'oubli, l'acheteur s'en frottera les mains, surtout si le marché a été signé. Personne ne pourra lui reprocher d'avoir méconnu l'article L 551-4 du code de justice administrative. Du coup, adieu référé précontractuel et contractuel.

Le requérant qui ne notifie pas sa requête en référé précontractuel à la personne publique, risque de le payer cher tant sur le terrain précontractuel que contractuel. Rappelez-vous : la commune de Maizières-lès-Metz avait rejeté comme anormalement basse l’offre de la société SDI extraction dans le cadre d’un marché de nettoyage des réseaux de soufflage de VMC et de dégraissage des hottes et ventilations de certains bâtiments de la ville. Le candidat évincé avait donc saisi le juge du référé précontractuel le 6 mai et avait appris par le mémoire en défense que le marché avait été signé le 10 du même mois, jour de la transmission de sa requête par le greffe du TA. Par un mémoire en réplique, la requérante avait persisté dans ses conclusions sur le fondement de l’article L.551-1 du CJA et avait présenté un référé contractuel sur le fondement de l’article L.551-13 du CJA. Le juge avait fait droit à son référé contractuel en annulant le marché. Dans ses conclusions, le rapporteur public, Bertrand Da Costa, s’est interrogé : « la signature après la saisine du tribunal ouvre-t-elle également la voie du contractuel si la collectivité est tenue dans l’ignorance de cette signature ? ». Il a estimé que : « la collectivité ne méconnaît la suspension qu’à partir du moment où elle a été informée du référé précontractuel. Si elle signe sans savoir qu’il y a un recours, on peut considérer que l’article L.551-4 du CJA est respecté. Cette approche est justifiée, l’auteur d’un recours doit faire preuve de diligence en informant le pouvoir adjudicateur » (1).

Pensez à notifier le référé précontractuel

La haute juridiction a suivi les conclusions de son rapporteur public. Dans un arrêt rendu le 30 septembre, le Conseil d’Etat a considéré « qu’en vertu de l’article L.551-14 du code de justice administrative, le recours contractuel demeure ouvert au demandeur ayant fait usage du référé précontractuel dès lors que le pouvoir adjudicateur n’a pas respecté la suspension prévue à l’article L.551-4 ou ne s’est pas conformé à la décision juridictionnelle rendue sur ce recours ; qu’il en va toutefois différemment lorsque le recours contractuel, présenté par un demandeur qui avait antérieurement présenté un recours précontractuel, est dirigé contre un marché signé durant la suspension prévue à l’article L.551-4 alors que le pouvoir adjudicateur était dans l’ignorance du référé précontractuel en raison de la méconnaissance, par le demandeur, de ses obligations de notification prévue à l’article R.551-1 ». En admettant le recours contractuel de la société SDI extraction, le juge du référé a commis une erreur de droit, l’ordonnance est donc annulée sur ce point. Appliqué au cas d’espèce, il ressort que la commune n’a donc pas commis de faute et n’a pas méconnu l’article L.551-4 du CJA en signant le marché puisqu’elle était dans l’ignorance du recours. En revanche, pour la société le coup est dur. Son inertie qui l’avait déjà privée de référé précontractuel, vient également de lui fermer les portes du référé contractuel. « Les conclusions présentées par la société sur le fondement de l’article L.551-13 du CJA sont irrecevables et ne peuvent être que rejetées ». La morale de l’histoire ? Mieux vaut notifier votre recours au pouvoir adjudicateur dès son dépôt au tribunal, plutôt que d’attendre que le greffe lui communique…

CE, 30 septembre 2011, commune de Maizières-lès-Metz, 350148

(1) Lire notre article Un grain de sable dans la passerelle précontractuel/contractuel