Le B.A.-BA de l’achat : L’exigence environnementale dans les marchés publics

Le critère prix n’est plus maître ! Les enjeux de développement durable prennent de plus en plus de place lors de la passation et l’exécution des marchés publics. La loi Climat et résilience et le Plan national pour des achats durables (PNAD) 2022-2025, obligent aujourd’hui les acheteurs publics à se préparer aux obligations de demain. En effet, par l'effet de la loi « Climat et Résilience » de 2021, les acheteurs publics auront l'obligation, à compter du 22 août 2026, d’intégrer des considérations environnementales au stade de la passation, mais également au stade de l’exécution du marché.

Quelles sont les exigences environnementales dans les marchés publics ?


La prise en compte des critères environnementaux dans les marchés publics s’inscrit dans un cadre législatif de plus en plus fourni et exigeant, voire contraignant. Voici un aperçu de l’évolution législative en la matière :
  • En 2018 plusieurs dispositions sectorielles en faveur de l’environnement ont été consacrées : dans le domaine de la restauration collective, la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018, connue sous le nom d'« EGALIM », impose que les repas soient composés d'au moins 50 % de produits durables et de qualité, ainsi que 20 % de produits issus de l'agriculture biologique. Parallèlement, dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP), la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, intitulée « ELAN », impose l'utilisation de matériaux et de techniques plus écologiques et responsables.
  • Loi n° n° 2021-1104 du 22 août 2021 « Climat et Résilience » : elle affirme que « la commande publique participe à l’atteinte des objectifs de développement durable, dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale » (article L.3-1 du code de la commande publique). Cette loi illustre un tournant majeur en matière d’achat durable : à partir du 22 août 2026, les acheteurs et les autorités concédantes sont dorénavant tenus de retenir au moins un critère environnemental et une clause environnementale pour tous les marchés publics supérieurs aux seuils européens.
  • Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte : il est désormais possible d’exclure les opérateurs économiques ne satisfaisant pas à l'obligation d'établir un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre (BEGES) et/ou ne respectant pas leurs engagements de publication d'information en matière de durabilité. Ces dispositions imposent également la rédaction d’un SPASER pour tous les acheteurs publics soumis au Code de la commande publique avec un montant total annuel des achats supérieur à 50 millions d'euros H.T
 

Comment intégrer une exigence environnementale au stade de la passation d’un marché public ?


Pour rappel, à partir du 21 août 2026, les acheteurs publics seront tenus d'intégrer, dans leurs appels d'offres, au moins un critère tenant compte des « caractéristiques environnementales de l’offre » (futur article L. 21527 du Code de la commande publique).

Qu'est-ce qu'un critère environnemental ? Il s'agit d'un paramètre que l'acheteur inclut dans son appel d'offres pour évaluer les impacts environnementaux des offres faites par les candidats. Ce critère vise à promouvoir des offres plus respectueuses de l'environnement et à orienter les marchés publics vers des choix plus durables.
 

Quelles sont les conditions ?


  • Lien direct avec l'objet du marché : Le critère environnemental doit être directement lié à l'objet du marché, c'est-à-dire qu'il doit concerner les caractéristiques du produit, du service ou des travaux visés.
  • Caractère objectif et précis : Le critère environnemental choisi doit être objectif, mesurable et ne doit pas favoriser un opérateur économique ou une catégorie d'opérateurs en particulier. Il doit également être suffisamment précis.
  • Pondération par rapport aux autres critères : Le critère environnemental intégré à l'appel d'offres doit être adapté à la nature et à l'importance du marché. Il ne doit pas créer une charge disproportionnée pour les candidats ni rendre leur participation difficile.
  • Recourir au coût du cycle de vie plutôt qu'au prix : Un critère « coût du cycle de vie » peut être utilisé à la place du traditionnel « prix », sans qu'il soit nécessaire d'ajouter obligatoirement un critère environnemental. Ce concept prend en compte des éléments au-delà du simple coût d'acquisition du bien ou du service, tels que la consommation d'énergie, les frais de maintenance, la fin de vie du produit, ainsi que les coûts liés aux externalités environnementales (comme les émissions de gaz à effet de serre et autres polluants, ainsi que les coûts pour atténuer le changement climatique).
 

Exemples de critère environnemental à intégrer dans l’appel d’offres

Un critère environnemental peut, par exemple, porter sur :
  • La consommation d'énergie et l'utilisation de ressources renouvelables ;
  • Les émissions de CO₂ et autres polluants ;
  • La durabilité des matériaux utilisés (recyclabilité, biodégradabilité, etc.) ;
  • La gestion des déchets ;
  • La réduction des emballages ;
  • L'impact sur la biodiversité ;
  • L'utilisation de processus de production durables et de technologies propres.
 

Comment intégrer une exigence environnementale au stade de l’exécution d’un marché public ?


A compter du 22 août 2026, la loi Climat et Résilience impose à tous les acheteurs publics de prévoir des conditions d’exécution intégrant des « considérations relatives à l’environnement » (futur article L. 2112-2, al. 2 du CCP). Pour cela, l’acheteur doit prévoir l’insertion d’au moins une clause environnementale.

A la différence d’un critère environnemental, la clause environnementale est une disposition contractuelle, qui impose des consignes d’exécution au titulaire du marché en matière de protection de l'environnement. Il s’agit d’un engagement que les opérateurs soumissionnaires doivent faire apparaitre dans leur offre et qu’ils doivent bien évidemment respecter, sous peine de pénalités.
 

La clause environnementale générale

Expressément prévue dans la majorité des CCAG issus de la loi « Climat et Résilience » de 2021 (Travaux, prestations intellectuelles, marchés industriels, etc…), la clause environnementale générale dispose que « Les documents particuliers du marché précisent les obligations environnementales du titulaire dans l’exécution du marché. Ces obligations doivent être vérifiables, selon des méthodes objectives, et faire l’objet d’un contrôle effectif. » Cette clause fait donc du titulaire le garant du respect par son éventuel sous-traitant de ces mêmes obligations. Pour une application efficace de la clause, l'acheteur doit définir des exigences claires, proportionnées et contrôlables. En fonction des caractéristiques du marché, différentes clauses environnementales ciblées peuvent être adoptées. Mais attention, tout comme les critères de sélection, les conditions d’exécution doivent être liées à l’objet du marché
 

La clause relative aux emballages 

Les CCAG prévoyant expressément cette clause imposent au titulaire l’utilisation d’emballages « réutilisables, recyclés, recyclables ou réemployés ». De plus, ces emballages demeurent la propriété du titulaire, qui est tenu de les collecter en vue de leur recyclage ou réutilisation. Cependant, une exception est prévue pour les marchés spécifiques ayant des normes sanitaires et d’hygiène, qui pouvant empêcher le titulaire de respecter ces obligations. Cela est notamment le cas pour le transport de denrées alimentaires.

La clause relative aux livraisons

Dans cette optique, tous les CCAG (sauf ceux relatifs à la maîtrise d'œuvre et aux travaux) incluent une clause visant à atténuer l'impact environnemental des conditions de livraison liées à l'exécution d'un marché. Par conséquent, lorsque cela est compatible avec les exigences de l'acheteur, le titulaire est tenu d'éviter les périodes de circulation aux heures de pointe, de favoriser le transport groupé et d'utiliser des véhicules à faibles émissions de CO2.
 

Les outils mis à disposition des acheteurs 

Le guichet vert est un service de conseil environnemental, gratuit et de proximité, qui met en œuvre le dispositif « clause verte ». Il s’agit d’un accompagnement de premier niveau permettant aux aux acheteurs publics d’intégrer des considérations environnementales dans leurs achats et en particulier d’avoir accès à des exemples de clauses environnementales, appelés « clauses vertes ».